Comment nous y avons mis fin

Les troupes canadiennes revenant d’Europe à Halifax à bord du paquebot affrété Olympic,en 1919.
BAC/PA-135768; Archives de la Ville de Toronto

PERSONNE NE S’ATTENDAIT À UNE TELLE GUERRE AU DÉBUT, ET PERSONNE N’AURAIT IMAGINÉ QUE LES CANADIENS JOUERAIENT UN RÔLE AUSSI DÉTERMINANT POUR Y METTRE FIN.

« Quel soulagement pour les parents des garçons en service! » écrivit le Lieutenant Walter Thomas Robus de Norwood, en Ontario, quelques jours après que la Première Guerre mondiale s’était terminée par la reddition de l’Allemagne le 11 novembre 1918. « Et quel soulagement de savoir que les massacres et la souffrance sont terminés. »

Robus s’était enrôlé dans le 2e Bataillon (Régiment de l’est de l’Ontario) du corps expéditionnaire canadien en aout 1914. Il fut blessé quatre fois. « Les Canadiens ont fini à merveille, écrivit-il, Mons a enfin été capturée. »

Pour Robus, et pour le Canada, le conflit avait été long et dur.

Déclenchée par le nationalisme impérialiste qui s’était répandu dans toute l’Europe, par les traités qui assuraient des alliances de défense mutuelle et finalement, par l’assassinat de l’archiduc Franz Ferdinand d’Autriche lors de sa visite à Sarajevo, la guerre opposa la Triple-Alliance entre l’Allemagne, l’Autriche-Hongrie et l’Italie à la Triple-Entente entre la Grande-Bretagne, la France et la Russie. Et le Canada se mit de la partie dès le début.

Le Canada n’avait pratiquement pas d’armée quand la Grande-Bretagne déclara la guerre à l’Allemagne, le 4 aout 1914. La 1re Division fut rapidement constituée et elle était encore relativement inexpérimentée quand elle subit l’attaque au gaz des Allemands, à Ypres, en avril 1915. D’une façon ou d’une autre, elle réussit à maintenir sa position et commença ainsi à se faire une réputation. À mesure que l’engagement du Canada augmentait, ses lauriers grandissaient. La force de deux, puis de trois et enfin de quatre divisions se battit à la Somme en 1916, captura la crête de Vimy, la Côte 70 et Passendale en 1917, et enfin, reconnue en tant que corps d’élite, elle combattit durant les cent jours de la campagne qui mit fin à la guerre.

Les Canadiens avaient appris à se battre et à s’imposer sur le champ de bataille, et ils avaient produit des dirigeants extraordinaires. Sir Arthur Currie était l’un d’entre eux. Ce promoteur immobilier de Victoria s’était distingué en tant qu’officier de milice, et il fut nommé commandant de brigade dans le premier contingent canadien. Currie prouva alors qu’il pouvait apprendre dans le feu de l’action, et quand le Corps canadien fut formé, en septembre 1915, il obtint le commandement de la 1re Division. Après la victoire à la crête de Vimy, et après que le lieutenant-général britannique, sir Julian Byng, fut promu au commandement de la Troisième armée britannique, le lieutenant-général Currie fut le premier Canadien nommé au commandement du Corps.

Jusqu’à la toute fin de la guerre, le Corps canadien se composait en grande partie d’hommes nés en Grande-Bretagne qui avaient immigré au Canada. Vers la fin de 1918, les quatre divisions de Currie étaient commandées par des officiers canadiens et les officiers d’état-major, hormis les plus hauts gradés, étaient canadiens. Les commandants de brigade et de bataillon étaient presque tous des Canadiens, tout comme leurs officiers subalternes.

Il est à noter que le Corps canadien et son superbe dossier militaire eurent une forte influence de « canadianisation » : où qu’ils fussent nés, les soldats se savaient excellents,
et ils se savaient canadiens.

À l’été de 1918, les rangs des bataillons canadiens étaient complets et leurs renforts étaient soit déjà à l’entraînement, soit en chemin vers la Grande-Bretagne. Le Corps eut la chance de pouvoir tenir ses positions au printemps, près de la crête de Vimy, malgré les offensives musclées des Allemands qui frappèrent durement leurs compagnons d’armes un peu plus au sud et un peu plus au nord. À ce moment-là, les Canadiens avaient déjà suivi un entraînement exigeant aux nouvelles tactiques de la guerre ouverte et de la coordination avec les corps blindés et l’Aviation royale. L’artillerie était devenue très habile dans la localisation et la destruction des canons ennemis, et dans l’utilisation de puissants barrages roulants qui permettaient aux fantassins de s’avancer jusqu’à leurs objectifs. Le Corps canadien était fin prêt à arracher ses plus grandes victoires.

Et il y en eut, des victoires. Ayant quitté leurs lignes près d’Arras en secret, les Canadiens, rejoints par des formations australiennes, britanniques et françaises, pulvérisèrent l’ennemi à Amiens le 8 aout. Il en résulta des gains de terrain inouïs, d’innombrables prisonniers et le désespoir chez l’ennemi.

Le jour de l’armistice, à Toronto, Mme J. Fraser, Joseph Fraser Jr., Mlle Ethel James, Frank James et Norman James (de g. à d.) lisent les bonnes nouvelles.
Archives de la Ville de Toronto

« Le jour noir de l’armée allemande », dit le général Erich von Ludendorff. Après Amiens, il n’y avait plus d’espoir de victoire pour l’Allemagne. Les soldats allemands continuèrent cependant à se battre courageusement. Au front d’Arras, les Canadiens attaquèrent de nouveau à la fin du mois d’aout, passant par les tranchées et les bunkers devant la ligne de Drocourt-Quéant. Les combats furent acharnés, les pertes très lourdes, mais le corps fit une brèche dans la ligne, ce qui obligea les Allemands à battre en retraite vers l’est, de l’autre côté du canal du Nord. Currie en dit que c’était « une des plus belles performances de la guerre » et il écrivit dans son journal qu’il s’agissait d’une victoire encore plus grande que celle d’Amiens.

La traversée du canal du Nord était le nouvel objectif de Currie, et il concocta pour l’atteindre un plan audacieux. Le canal serait franchi à un endroit sec, et l’infanterie se disperserait ensuite au nord et au sud. Ses supérieurs britanniques avaient des doutes, mais Currie persista, et ses soldats prouvèrent qu’il avait raison, franchissant l’obstacle et poussant plus avant. C’étaient, écrivit Currie : « les combats les plus féroces que nous ayons jamais connus […] ».

Dans une autre lettre, il écrivit qu’il n’avait « jamais vu le boche se battre plus fort. Il est comme un rat acculé. » Les Canadiens finirent par l’emporter et peu après, ils libérè-rent Cambrai, important centre d’approvisionnement et carrefour ferroviaire et routier des Allemands au Nord de la France. Les troupes du Kaiser battaient alors en retraite.

Il y eut une dernière attaque programmée à Valenciennes, juste à l’ouest de la frontière belge. Le mont Houy, qui surplombe la ville, tomba au bout d’un puissant barrage d’artillerie et d’une attaque menée par une seule brigade. L’avancée, devenue poursuite, continua grâce à la progression par dépassement des bataillons d’infanterie qui s’efforçaient de maintenir le contact avec l’ennemi en déroute. La cavalerie, enfin utile, passa devant tandis que les autocars blindés des brigades de mitrailleuses motorisées mettaient leur puissance de feu à contribution. Le 9 novembre, les Canadiens étaient aux abords de Mons, en Belgique, où le corps expéditionnaire britannique s’était mesuré aux Allemands pour la première fois en aout 1914.

Les envoyés allemands négociaient alors les conditions de leur reddition avec le maréchal Ferdinand Foch, commandant en chef des forces alliées. Quand ils signèrent l’armistice – en réalité la capitulation des Allemands – tôt le matin du 11 novembre, les Canadiens avaient déjà libéré Mons. Les armes se turent à 11 h précises.

Un prisonnier allemand traverse un canal à Valenciennes, en France, en novembre 1918.
MDN/BAC/PA-003383

Les tragédies de la guerre semblaient interminables. La pandémie de grippe espagnole ravageait les rangs, faisant des dizaines de milliers de malades et en en tuant un grand nombre. Des soldats qui avaient survécu aux combats en mouraient, et des parents et amis y succombaient aussi au pays.

Le Canada avait pris part à la Grande guerre sans réserve, et ses citoyens-soldats étaient devenus de féroces guerriers. Leurs victoires étaient légion; leurs pertes, énormes : plus de 66 000 morts, presque 175 000 blessés. Malheureusement, la guerre ouverte des 100 derniers jours fut terriblement couteuse : 45 000 victimes — près de 20 pour cent du total — furent tuées ou blessées lors de ces combats acharnés qui durèrent un peu plus de trois mois. Néanmoins, ces batailles avaient été indispensables pour gagner la guerre, et elles étaient certainement les plus grandes réussites militaires canadiennes. Le corps d’armée canadien de Currie mérite sa place distinguée dans l’histoire du pays.

Pillard/National Trust/836535; MDN/BAC/PA-003248

Signataires à l’étroit

Les signataires alliés et allemands se réunirent dans une voiture de chemin de fer sur une voie d’évitement au nord-est de Paris. De g. à d. : le capitaine allemand Ernst Vanselow, le comte allemand Alfred von Oberndorff, le major-général allemand Detlof von Winterfeldt, le capitaine britannique Jack Marriott, le secrétaire d’État allemand Matthias Erzberger, le contre-amiral George Hope, l’amiral britannique Rosslyn Wemyss, le maréchal Foch (debout) et le général Maxime Weygand.


QUI A SIGNÉ L’ARMISTICE?

Les deux signataires des Alliés étaient :

le maréchal français Ferdinand Foch, commandant en chef des forces alliées
l’amiral Rosslyn Wemyss de Grande-Bretagne, chef d’état-major de la Marine

Les six autres membres de la délégation étaient :

Maxime Weygand, chef d’état-major de Foch. Il lut les conditions de l’armistice aux Allemands
le contre-amiral George Hope, sous-chef d’état-major de la Marine
le capitaine Jack Marriott,adjoint naval au chef d’état-major de la Marine

Les quatre signataires de l’Allemagne étaient :

Matthias Erzberger, secrétaire d’État et chef de la délégation allemande
le comte Alfred von Oberndorff, ministère des Affaires étrangères
le major-général Detlof von Winterfeldt, armée
le capitaine Ernst Vanselow, marine

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