Notre propre Croix de Victoria

Il n’y a rien d’étonnant à ce que le Canada, de plus en plus assuré dans son indépendance, désire se débarrasser de beaucoup d’éléments du colonialisme. L’année de notre centenaire, 1967, nous avons fièrement créé l’Ordre du Canada et notre système d’honneurs et de récompenses. Ce système ne comprenait pas alors de décorations militaires spécifiques pour la vaillance, car elles étaient décernées aux Canadiens par le gouvernement britannique. En 1992, nos propres médailles pour la vaillance militaire, conçues par la chancellerie, ont été acceptées par Sa Majesté la reine Elisabeth II. Il s’agissait de la Médaille de la vaillance militaire, de l’Étoile de la vaillance mili­taire et de la plus importante de toutes : la Croix de Victoria. Jusqu’à cette année, la CV n’était, pour le grand public, qu’un dessin dans les bureaux de la chancellerie, et la première vient d’être dévoilée à la résidence de la Gouverneure générale.

Les Canadiens à qui la Croix de Victoria a été décernée par la Grande-Bretagne ne sont plus mais nous sommes nombreux à nous rappeler d’une génération d’hommes généreux qui se sont distingués aux yeux du public durant les années d’après la Seconde Guerre mondiale : les récipiendaires de la CV comme Fred Tilston, Cecil Merritt et Smokey Smith. Et comme cette brave génération, les hommes et les femmes des forces armées d’aujourd’hui, surtout ceux qui se trouvent en Afghanistan, se mesurent à un ennemi dangereux. L’Étoile de la vaillance militaire et la Médaille de la vaillance militaire ont été décernées à des Canadiens qui ont participé à des combats intenses en Afghanistan, et ce ne serait que juste si la Croix de Victoria était décernée à un soldat canadien, lorsqu’il l’aurait méritée.

Tenir une promesse sacrée

Margaret M. Kearney avait 19 ans quand elle est montée à bord d’un bateau côtier à Port aux Basques (T.-N.) pour se rendre à Sydney (N.-É.). C’était en 1944 et, bien que le vent avait tourné en faveur des alliés à la Bataille de l’Atlantique, l’ennemi n’avait de cesse de détruire des vies et des navires. Mme Kearney se souvient d’un sentiment de « grande terreur » à cause du danger des sous-marins mais, comme des milliers de volontaires, elle était jeune et partait à cette aventure qu’était l’effort de guerre.

Elle était allée à plusieurs reprise à la basilique catholique romaine de St. John’s, sur les marches de laquelle elle regardait le havre. « En ce temps-là, la vue était assez bonne de là-bas » , dit-elle. « On voyait tous les navires brisés; certains avait perdu leurs mâts, d’autres n’avaient plus de proue. On voyait ça au jour le jour. » Ce qu’on ne voyait pas, mais on y pensait, ce sont les navires qui ne sont jamais revenus.

Mme Kearney, fière d’avoir servi dans le Service féminin de la Marine royale du Canada, est une des nombreuses an­ciennes combattantes de la Seconde Guerre mondiale à avoir participé, au mois de mai dernier, aux commémorations de la Bataille de l’Atlantique, à Halifax. Les manifestations auxquelles elle a assisté faisaient partie de nombreux événements qui ont eu lieu partout au Canada, entre autres dans la capitale nationale, en l’honneur du 65e anniversaire.

Les hommes et les femmes qui ont servi savaient que le résultat de la guerre dépendrait de l’arrivée des convois de navires marchands mais ils ne s’y attardaient pas. Ils se concentraient principalement sur le travail bien fait — l’accomplissement des tâches journalières qu’on avait à faire quand on était dans les forces armées. Les conditions de travail à bord étaient dures et dangereuses. Les équipes d’aviateurs, quant à elles, risquaient d’être obligées d’amerrir ou de s’écraser en mer. On pouvait perdre la vie instantanément ou mourir peu à peu dans les eaux glacées. Plus de 3 700 marins de la Marine royale du Canada et de la marine marchande canadienne ont péri en mer. Des membres de l’Aviation royale du Canada ont aussi été perdus — des centaines d’entre eux.

Les commémorations servent à atti­rer l’attention du public sur l’importance de leurs réalisations historiques mais, ce qui est encore plus important, les cérémonies et les manifestations officielles nous rappellent d’une promesse sacrée que doivent tenir tous les Canadiens : celle de les honorer et de se souvenir de leur service et de leur sacrifice dans la plus grande dignité.

La responsabilité de nous assurer que nos forces maritimes restent puissantes, avec l’équipement approprié et des modernisations qui arrivent au moment opportun, fait partie de notre engagement envers ceux qui ont servi en mer. Les marins d’aujourd’hui ont des défis bien différents à relever, et bien que les risques sont réels, comme c’est le cas pour leurs homologues des autres services, ils sont bien entrainés et préparés pour leurs tâches. Ces hommes et ces femmes ressentent un immense respect envers ceux qui ont servi et ils sont fiers de se trouver en leur compa­gnie. C’est une connexion que ne ressentent que ceux qui ont choisi de risquer leur vie au service de leur pays.

Ce mois-ci, il va y avoir des commémorations pour se souvenir des 26 791 Canadiens qui ont servi à la guerre de Corée, laquelle a duré à partir du 25 juin 1950 jusqu’à l’accord de l’armistice en Corée, lequel a été signé le 27 juillet 1953.

Envisager les 20 prochaines années

Bien qu’on attendait un livre blanc détaillé, le premier ministre Stephen Harper et le ministre de la Défense Peter MacKay ont décidé d’annoncer la stratégie défensive de 20 ans pour le Canada durant une couple de discours prononcés le 12 mai, en présence d’une foule réceptive, au Manège militaire d’Halifax. Une grande partie de ce qui a été annoncé dans le cadre de la Stratégie de défense le Canada d’abord est déjà familier suite à une série d’annonces d’acquisition faites en 2007.

Il n’y a pas de doute que le militaire du Canada avait périclité durant les années 1990, la guerre froide ayant disparu et le Canada ayant commencé à réduire ses engagements de maintien de la paix qui avaient dépassé ses possibi­lités en équipement et en personnel.

Le ministre de la Défense nous a fait remarquer que 17 aéronefs de transport tactique C-130J ont été commandés en janvier. Il y a eu des achats de nouveaux hélicoptères moyens-porteurs et d’hélicoptères de transport lourd, ainsi que de 100 chars d’assaut Leopard 2 et d’autres camions blindés. En juillet 2007, le gouvernement a annoncé qu’il allait acquérir six ou huit navires de patrouilles extracôtiers qui couteraient 3,1 milliards de dollars. Le réarmement et la moder­nisation des frégates de classe Halifax devraient aussi commencer en 2010 et durer jusqu’en 2017.

« Si un pays désire qu’on le prenne au sérieux, il faut qu’il se procure les capacités pour pouvoir agir. Ce n’est pas plus compliqué que ça. Sinon, il abandonne son droit d’être partie prenante », dit M. Harper à la foule. Bien que nous aurions aimé que le livre blanc con­tienne un peu plus de détails, avec des exposés sur ce qu’il va en couter au contribuable canadien, nous pouvons au moins voir ce dont on a besoin en ce qui concerne un équipement meilleur et plus sécuritaire. Il s’agit maintenant de passer les commandes. Comme cela a été le cas pour le report de l’achat des hélicoptères, chaque atermoiement coute davantage et fait que le pays n’est pas aussi capable de protéger ses frontières et de respecter ses engagements internationaux. Les actes que nous posons aujourd’hui nous apportent des bénéfices aujourd’hui et nous en apporteront aussi demain.

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