“La Légion a tant fait pour moi. Je voulais donner quelque chose en retour. C’est la quatrième fois que l’athlète de l’heptathlon Adrienne Bethune allait aux Championnats nationaux d’athlétisme de la Légion, et elle s’est portée volontaire sans hésiter pour le clou des manifestations, la visite aux anciens combattants du Centre de soins de longue durée George Derby à Burnaby (C.-B.). J’ai pensé que ce serait une si belle occasion de rencontrer les gens grâce à qui tout ceci est possible. C’est vraiment un très grand honneur pour moi.”
Cette fille de 17 ans de Mississauga (Ont.), dont le grand-père a servi à la Seconde Guerre mondiale, a aussi décidé d’apporter un manteau de son équipe et elle l’a offert à un des anciens combattants ontariens. Elle ressent une gratitude immense envers la Légion. “Ça fait quatre ans (que je viens aux championnats) et ça a été le temps le plus épatant de ma vie, c’est la meilleure compétition pour les gens de mon âge.”
Cette année, les 30e championnats nationaux de la jeunesse de la Légion ont été organisés littéralement sur une montagne, à Burnaby. À peu près 400 athlètes, entraîneurs et chaperons de partout au Canada se sont assemblés à l’Université Simon Fraser du 10 au 17 août, où ils se sont attelés aux tâches que sont la compétition et l’entraînement à 1 200 pieds au-dessus du niveau de la mer.
Bethune a combattu non seulement ses pairs mais la grippe qui faisait le tour des athlètes. Elle a quand même obtenu l’or à l’heptathlon des filles de moins de 18 ans, battant Alana Pattison de la Colombie-Britannique de 3 points seulement. L’heptathlon comporte 7 épreuves : les 80 mètres haies, le saut en hauteur, le lancer du poids, le sprint de 200 mètres, le saut en longueur, le lancer du javelot et la course de 800 mètres. “Je ne me suis pas sentie très bien durant ces deux jours”, reconnaît l’Ontarienne, “mais j’ai été très chanceuse et je suis très contente d’avoir gagné.”
Bethune a l’intension de suivre la voie tracée par son père, Tim, qui a participé aux Olympiques de Los Angeles en 1984. Tout en s’entraînant pour 2012, elle va aussi être très occupée aux études. Ayant sauté une année, elle vient de commencer ses études universitaires à McMaster, à Hamilton. Bethune, choisie capitaine de l’équipe de la Division de l’Ontario, illustre tout ce que la Légion espère encourager avec cette manifestation : le leadership, la motivation et un profond sentiment de commémoration.
Cela va très bien avec le thème de cette année qui est “l’honneur, l’esprit et le souvenir”, un thème que le premier vice-président national Wilf Edmond allait reprendre chaque fois qu’il s’adressait aux athlètes. À l’occasion de l’orientation du vendredi matin au théâtre de l’université, Edmond a porté son regard vers les adolescents qui portaient des uniformes colorés et reconnu nombre de visages. “Le fait que vous reveniez est un signe que cet événement vaut la peine. La Légion royale canadienne est fière et heureuse de vous donner une si belle occasion”, dit-il. “Nous le faisons en l’honneur de tous ceux dont la jeunesse a été interrompue par les guerres auxquelles ce pays a dû aller pour assurer notre liberté et celle d’autres peuples.”
Blair DuGray, le donneur de cours pratiques en chef d’Athlétisme Canada, dit aux athlètes : “regardez les gens qui sont assis à votre droite et à votre gauche, et puis à vous-mêmes, parce que certains d’entre vous vont représenter le Canada un jour prochain”. DuGray et ses entraîneurs allaient mettre les adolescents à l’épreuve aux ateliers durant la semaine, grâce à quelques vieux exercices et en se servant de la technologie vidéo de Dartfish. En attendant, toutefois, il demanda une ovation pour la Légion.
Brit Townsend, deux fois olympienne, seconda la motion. “Sans la Légion, nous n’aurions pas l’occasion d’assembler les meilleurs jeunes du pays.” Townsend, qui a étudié à Simon Fraser, est actuellement entraîneur en chef pour l’athlétisme et la course de fond. En plus de participer à la direction de la manifestation de la Légion, elle a inspiré les athlètes en attirant leur attention lorsqu’elle s’est rappelée de ses moments les plus fiers : quand elle a brisé le record canadien de longue date aux 1 500 mètres lors des finales aux championnats mondiaux. Cela eut lieu après une photo témoin aux qualifications, où elle s’était jetée violemment entre deux corps et “espéré pour le mieux”. Le résultat fut décidé après plus de 30 minutes pleines d’anxiété. “J’allais me rappeler de l’image de mon entraîneur Gerry Swan qui traversait la piste à grands pas, les larmes aux yeux, en criant que j’avais réussi.”
Townsend dit aux jeunes de 13 à 17 ans qu’il était temps d’accélérer leur entraînement d’un temps, car un monde d’occasions était à leur portée : les bourses universitaires, les voyages et les occasions de rencontrer des gens comme eux. “Il faut des années pour développer les plus grands athlètes. C’est un moment important dans votre carrière.”
Elle encouragea aussi les athlètes à se renseigner sur ce que les universités canadiennes offrent avant de porter leur regard vers le sud. Ce message allait s’avérer nécessaire. En plus du souvenir, l’autre thème qui est apparu durant la semaine est celui selon lequel les meilleurs et les plus doués du Canada pensaient sérieusement aller étudier aux États-Unis où les bourses d’athlétisme sont nombreuses.
En fait, cette même semaine-là, Jenna Martin, l’étoile néo-écossaise de la piste qui a fixé un record à la course de 400 mètres aux championnats de la Légion de 2003, prenait le chemin de l’Université du Kentucky grâce à une bourse.
Bethune, toutefois, va rester à la terre de ses aïeux. À McMaster, l’heptathlète va obtenir une aide du gouvernement de l’Ontario dans le cadre du programme Quest for Gold qui finance les jeunes athlètes qui vivent et s’entraînent dans la province.
Les jeux commencèrent officiellement vendredi soir. À la cérémonie d’ouverture, sur le terrain de l’Université Simon Fraser, les athlètes tenaient un coquelicot à la main lorsqu’ils observaient les deux minutes de silence, qu’ils écoutaient le Vancouverois Ronnie Way chanter Maples Of The Valley en l’honneur des anciens combattants et qu’ils étaient à l’écoute des dignitaires comme Edmond, le président Gerry Vowles de la Division de la Colombie-Britannique/Yukon, le maire Derek Corrigan de Burnaby et le président national de la Légion Jack Frost. La présidente du Comité des préparatifs locaux Sharel Fraser dit aux ados, “vos rêves sont nos espoirs d’avenir”.
Avant d’appuyer sur la gâchette du pistolet des officiels, Frost déclarait “que chacun de vous réalise ses meilleurs résultats à ces jeux. Et n’oubliez pas, vous êtes ici pour vous amuser, pour rencontrer de nouveaux amis qui viennent de tous les coins du pays et apprendre à connaître leur collectivité”.
Le flambeau de l’amitié a alors été apporté sur l’estrade par un groupe de petites filles membres d’un club de course local. Elles allaient revenir à la piste, tôt le lendemain matin, pour donner un coup de main.
La planification des championnats a duré plus de 18 mois. Fraser avait enrôlé des douzaines de bénévoles des filiales de la Légion et des dames auxiliaires locales pour les nombreuses tâches à accomplir : le transport, les fonctions rattachées aux cérémonies, l’organisation d’une randonnée au mont Grouse pour les gosses, l’organisation des divertissements aux filiales pour les adultes. Lesley Maudsley, deuxième vice-présidente des DA de la Division de la Colombie-Britannique/Yukon, avait une équipe maîtresse pour l’aider à trouver des fonds, nourrir les bénévoles affamés et préparer le gros banquet de fermeture.
Les organisateurs n’auraient pas pu planifier la météo, mais on aurait quand même dit qu’ils l’avaient fait. À part d’un samedi matin frisquet, le temps durant les championnats a été radieux. C’était aussi une fin de semaine occupée, durant laquelle plus de 70 épreuves ont eu lieu dans les catégories des cadets (moins de 16 ans) et des juniors (moins de 18 ans). Les athlètes ont couru, lancé et sauté, et ils ont bu beaucoup d’eau.
Grâce à la direction de l’officiel de l’athlétisme LeRoy Washburn, les choses se sont passé à merveille. Washburn, un officiel néo-brunswickois certifié au niveau international, est un inconditionnel de la Légion depuis plus de 50 ans. Cette année, son épouse Loretta et lui ont également célébré leur 50e anniversaire durant les championnats.
Les jeux ont été une bataille entre l’Est et l’Ouest. Malgré une dure compétition de la part de la division hôtesse, l’Ontario s’est placé à la tête de la liste des médailles d’or avec les 31 qu’il a remportées. La Division de la Colombie-Britannique/ Yukon a obtenu 24 médailles d’or, et a fixé autant de records de la Légion que sa rivale. Elles ont inscrit trois performances record chacune et celle du Nouveau-Brunswick en a inscrit une.
Cette dernière a eu lieu grâce à Geneviève Lalonde, âgée de 14 ans. En plus de rapporter les seules médailles d’or du Nouveau-Brunswick chez elle, chez les filles cadettes des 1 500 mètres et des 3 000 mètres, elle a brisé le record des 3 000 mètres. Ce n’est même pas une course à laquelle elle prend plaisir. “Je préfère de beaucoup les 1 500.” Après avoir couru trois kilomètres en même pas neuf minutes et 57 secondes, Lalonde criait pour encourager les autres coureuses. Elle était peut-être fatiguée (la plupart des gens auraient été cataleptiques) mais Lalonde n’a pour autant pas oublié de reconnaître la Légion. “Je voulais vraiment aller plus loin cette année : travailler aussi dur que les membres de la Légion.” L’ado reconnaissante a laissé tomber la danse pour se concentrer sur la course, mais elle a quand même eu le temps pour une couple d’autres poursuites. “J’essaie de me rendre aux Jeux du Canada, au squash, et je joue au soccer provincial.”
Trey Henderson, l’homme fort de Richmond (C.-B.), a remporté les épreuves des garçons juniors aux lancers du disque et du marteau de 5 kilogrammes, démolissant son propre record de 2005 au lancer du marteau grâce à un lancer de 67,45 mètres. “Ça a été une bonne fin de semaine”, dit-il avec un large sourire. “Je n’ai rien à redire avec mes deux médailles d’or.” Henderson fait des plans magistraux, et aller aux Olympiques n’en est qu’un. Alors qu’il ne lui reste qu’une année d’école secondaire à faire, on lui a déjà offert trois bourses sportives aux États-Unis : pour jouer au foot-ball. “L’important, pour moi, c’est l’école et le sport. J’ai le temps de voir mes amis, mais il faut que ce soit les affaires avant tout, genre […] parce qu’il s’agit de mon avenir.”
Pendant ce temps, sa coéquipière Stacey Irvine de Smithers (C.-B.) attirait les regards au saut à la perche. D’abord, elle a dépassé les 3,50 mètres, le record de la Légion chez les filles de moins de 18 ans. Ensuite, elle a réussi un saut de 3,70 mètres, mettant le record hors de portée pendant un certain temps. Finalement, elle a décidé d’essayer de battre son propre record de 3,80 mètres, celui qu’elle a inscrit aux Championnats mondiaux de la jeunesse au Maroc en 2005. Il y a eu des souffles coupés lors de l’un de ses essais quand elle a atterri d’une manière qui semblait douloureuse. Imperturbable, Irvine essayait encore une fois. Elle ne le réussit pas, mais elle n’en fut pas déconcertée. Après tout, ce serait sa deuxième médaille d’or, qu’elle ajoutait à celle qu’elle avait gagnée aux 110 mètres haies. Quant à l’atterrissage dur, Irvine dit en riant “on a tellement d’adrénaline, ça ne fait pas vraiment mal”. La sauteuse à la perche, évidemment douée d’un seuil de sensation douloureuse élevé, a l’intention de se lancer en physiothérapie ou en science sportive.
À propos de blessures, il y a eu les entorses et les foulures habituelles autour de la piste, mais rien de grave heureusement. Tara Langlois, une technicienne médicale d’urgence qui travaillait sous la tente des premiers soins, observait à quel point les blessés, tout feu tout flamme, étaient désireux de retourner à la compétition. “On les emballe et on les renvoie. C’est comme ça.”
C’était le cas d’Hubert Chevrette-Bélisle de Repentigny (Qc) qui est allé voir Langlois pour des douleurs aux jambes. Inspiré par la présence intimidante de son coéquipier et partenaire d’entraînement Gabriel El Hanbli, Chevrette-Bélisle s’est remis de sa dou-leur et a emporté l’or aux 400 mètres haies juniors, battant El Hanbli de moins d’une seconde. Les deux ont obtenu plusieurs médailles aux épreuves des haies et des relais.
En fait, il y a eu nombre de gagnants multiples, et ils ont tous été causes de moments spéciaux durant les jeux. Loudia Laarman de Lethbridge (Alb.), a illuminé le podium quand elle a accepté les médailles d’or qu’elle a gagnées aux sprints de 100 mètres et 200 mètres chez les juniors. Le Néo-Écossais Mason Foote, qui a gagné la course de 100 mètres chez les juniors et obtenu la médaille de bronze aux 200 mètres, a pris le temps de donner des trucs à ses coéquipiers dans les courses de relais. Mike Robertson de Williamstown (Ont.) s’est agenouillé et fait le signe de la croix avant de gagner la course de 400 mètres chez les juniors, et par la suite il a embrassé son estimable rival, Joel Senick de Saskatoon. Robertson a aussi remporté l’or aux 200 mètres par la suite.
Maddie Buttinger, une des favorites locales des championnats de la Légion de 2003 à Kitchener (Ont.), qui retournait aux jeux de la Légion pour la troisième fois, a ramassé encore d’autres médailles. Cette fois-ci, sa petite soeur Jessica l’accompagnait, qui est montée sur le podium régulièrement aussi, aux épreuves des moins de 16 ans. Leur expérience en Colombie-Britannique était une affaire de famille. Le clan Buttinger au complet, y compris les parents Pam et Gord, ainsi que la fratrie Natalie, Danielle, Emily, Rachel et Scott, ont fait la randonnée vers l’ouest pour les encourager.
Maddie, âgée de 16 ans, s’est beaucoup améliorée depuis la première fois qu’elle s’est rendue aux nationaux de la Légion, et elle est allée aux Championnats mondiaux de la jeunesse au Maroc l’été dernier. Cela l’a empêchée de se rendre aux nationaux de la Légion à Edmonton, mais Buttinger dit que ce fut une expérience inestimable. “Ça donne un tout autre point de vue, parce qu’on pense qu’on réussit vraiment bien au Canada, mais quand on est au niveau mondial, c’est fou de voir ces gens.” Bien qu’elle n’ait pas obtenu de médaille, elle y a quand même été inspirée.
Cette année, Buttinger a obtenu quatre médailles de la Légion : deux d’or aux courses de 400 mètres relais et individuels, une d’argent aux 400 mètres haies et une de bronze au saut en hauteur. Le visage dur comme l’acier que Buttinger avait durant les jeux faisait place aux sourires après chaque épreuve quand ses petites soeurs lui tapotait la tête avec affection.
Gord Buttinger dit que ce n’est que lorsque sa fille aînée est allée aux nationaux de la Légion qu’elle a vraiment commencé à prendre plaisir à l’athlétisme. Depuis lors, elle s’entraîne fermement et montre l’exemple à sa fratrie, dont tous les membres font aussi de l’athlétisme. “Il ne s’agit par d’être le meilleur. Il s’agit de faire de son mieux. Maddie est une bonne guide dans la famille.”
C’est exactement ce qu’on désire voir à la Légion, dit Edmond. “Nous faisons ceci parce que nous croyons qu’il existe un besoin continu de développer nos jeunes afin qu’ils deviennent les leaders effectifs que ce pays a toujours eus.”
À la fin des championnats, le flambeau de l’amitié était passé de Fraser à Helen Ladouceur, la déléguée des DA de la Division du Nouveau-Brunswick. Les jeux reprendront à Oromocto en août 2007.