La guerre mondiale au large de nos côtes

En 1942, les U-boots commencèrent à se montrer au large de l’Amérique du Nord, dont l’U-69 qui coula le vaisseau marchand Carolus près du phare de la Pointe Mitis, Qc.
iStock; Reford Gardens; Paul Gendron/Reford Gardens

La bataille du Saint-Laurent qui a transformé la vie des Terre-Neuviens

Il était près de minuit au bord du fleuve Saint-Laurent ce 8 octobre 1942. Bien installé dans la salle de séjour de la maison du gardien de phare à la Pointe Mitis, Qc, David Gendron, 21 ans, rédigeait une lettre d’amour.

Le reste de la maisonnée dormait : sept de ses frères et sœurs; l’institutrice de la localité qui était en pension; la mère de David, Eugénie; et son père, Octave, le gardien de phare.

Une guerre faisait rage au large des côtes et dans le monde. Elle était loin, mais pointait peu à peu son nez. La bataille de l’Atlantique avait atteint le golfe du Saint-Laurent et le fleuve.

Ce qui allait devenir la bataille du Saint-Laurent avait déjà fait des dizaines de victimes, les premières vies perdues au combat dans les eaux littorales canadiennes depuis la guerre de 1812.

Plus de 400 personnes ont péri au cours des trois saisons de navigation durant lesquelles les unterseeboots de l’amiral allemand Karl Dönitz rôdaient près des côtes canadiennes. Le trafic maritime a été coupé à certaines périodes pendant ces trois ans. Et c’est en 1942 que la plupart des pertes ont eu lieu.

En tout, les U-boots allaient couler 23 bâtiments marchands et quatre vaisseaux de la Marine canadienne dans l’estuaire et aux alentours, ainsi que cinq autres transporteurs de fret à l’île Bell de Terre-Neuve.

En juillet 1942, Octave avait signalé la présence d’un sous-marin dans la baie, entre son phare et le lieu de villégiature sur l’autre rive.

Peu après, en Allemagne, un « commandant [d’U-boot] dit que son équipage et lui avaient écouté de la musique dansante au Canada et vu les phares de voitures qui se déplaçaient sur une grande route », publia la Montreal Gazette le 15 octobre 1942. Le journal faisait remarquer que la route pittoresque de Gaspé, destination touristique privilégiée, longeait la côte près de Métis-sur-Mer, à deux pas de la Pointe Mitis.

Les frappes sous-marines étaient devenues des événements presque familiers, bien que redoutés, de la vie. »

Pointe Mitis, Qc., où habitaient David Gendron et sa famille.
Paul Gendron/Reford Gardens

Mais, en cette soirée d’octobre, alors que s’estompaient les couleurs d’automne et que l’air devenait humide et froid, il n’y avait pas de joyeux touristes, rien que quelques marins maussades sillonnant le grand fleuve emprunté par les peuples autochtones depuis la nuit des temps, et sur lequel Jacques Cartier avait vogué pour la première fois en 1534. Quatre siècles plus tard, ce fleuve était devenu une voie vitale au commerce international et au transport d’hommes et de matériel, ainsi qu’un champ de bataille qui a marqué les civils des petites villes bordant la pitto-resque péninsule de Gaspé.

Une explosion sourde provenant du fleuve retentit soudainement, faisant vibrer les fenêtres du salon de la famille Gendron. Le jeune David, qui assurait le service de nuit en tant que gardien de phare adjoint, détacha les yeux de sa missive. Il dit plus tard qu’il était 0 h 10. Dans le journal du sous-marin, il a été noté que la première frappe avait eu lieu à 23 h 57.

Vinrent ensuite de fortes déflagrations qui firent trembler sur ses fondations de pierres carrées la maison de bois.

Le traversier Caribou allait sombrer dans le détroit de Cabot cinq jours plus tard et là, sur le fleuve, le responsable de la tragédie, le capitaine Ulrich Gräf aux commandes de l’U-69, venait de lancer une salve de torpilles.

Une seule suffit pour que coule le Carolus, petit navire à vapeur de 2 375 tonnes qui transportait des barils vides. Il se scinda en deux et sombra poupe en avant au fond du fleuve. Les amarres des barils rangés sur le pont arrière se rompirent, et ceux dans la cale en jaillirent quand fut immergée la poupe. Tout cela ne prit que deux minutes à peine.

Octave dévala les escaliers et se précipita dehors dès que le bruit retentit. Il traversa en courant les quelques mètres qui séparaient la maison du phare, puis monta à perdre haleine les escaliers en colimaçon qui menaient au pont-galerie situé à côté de la salle du phare, où il colla un œil à un vieux télescope en laiton.

Des grains de pluie avaient balayé le fleuve pendant toute la soirée, mais selon le journal de Gräf, le fleuve lui-même était « d’huile » et il présentait une « forte phosphorescence ». Comme s’en aperçut alors Octave, la visibilité était telle que sans être expert en guerre navale, on pouvait en conclure qu’un sous-marin allemand commettait ses méfaits à moins de cinq kilomètres de la plage où ses enfants avaient gambadé tout l’été.

L’U-69 avait tiré en surface. L’Hepatica et l’Arrowhead, deux corvettes canadiennes qui escortaient le convoi NL-9 de Labrador à Québec, lançaient des fusées éclairantes. Elles se seraient même servies de leurs canons de pont contre l’U-boot en fuite.

À peine un mois plus tôt, à Saint-Yvon, Qc, à 300 kilomètres de la péninsule située dans l’embouchure du fleuve, une torpille avait percuté la côte, et son explosion avait fait voler des fenêtres en éclats dans le village. Octave s’inquiétait pour son foyer et sa patrie. Il pensait même que les Allemands tiraient sur le phare.

Mais à l’époque, les téléphones étaient rares le long de la péninsule gaspésienne. Malgré l’importance de ses fonctions, Octave n’en avait pas.

La station de l’Aviation royale canadienne de Mont-Joli, Qc, se trouvait à 20 kilomètres, et le téléphone le plus près était dans le village, à cinq kilomètres de là. Il quitta la maison avec les plus jeunes de ses enfants.

« Je n’ai pas compté mes petits, avoua-t-il sept ans plus tard au magazine Maclean’s. J’en ai pris le plus possible dans la voiture, j’ai fermé les portières et j’ai filé jusqu’au téléphone. »

Le trajet fut d’une lenteur exaspé-rante. Octave déposa ses enfants à moitié endormis au bout de la route de service, assez loin de la plage pour apaiser ses craintes. Il ordonna à l’ainé de surveiller les autres, puis il s’en alla faire son rapport.

Six minutes après avoir raccroché, il vit un imposant bombardier au-dessus de la pointe qui se dirigeait tout droit vers le feu de l’action.

« Après cela, dit-il à Jack McNaught, le journaliste de Maclean’s, le gouvernement m’a installé le téléphone à la maison afin que je puisse faire mes rapports plus vite. »

Octave obtint aussi la permission d’éteindre le phare cette nuit-là. La rotation continuelle de quatre tours par minute cessa.

L’extinction des lumières faisait l’objet de débats à Ottawa. Dans les villes et les villages, on réduisait l’intensité de la lumière, mais Pointe Mitis connaissait 1 000 heures de brouillard par an, et selon les autorités, il était, semblait-il, plus important d’aider la navigation que d’atténuer la menace des U-boots. Elles avaient donné l’ordre de maintenir les feux de navigation, sauf avis contraire.

Un système finit par être mis sur pied : la CBC et Radio-Canada diffusaient des avis quatre fois par jour pour dire aux gardiens de phare quand ils devaient éteindre leurs balises. « A » comme « Alphonse » était diffusé trois fois pour maintenir les feux; « B » comme « bonbon » signifiait qu’un U-boot avait été repéré et que les activités devaient cesser jusqu’à nouvel ordre.

Toutefois, malgré le renforcement des mesures de défense pour les convois qui servaient au transport d’hommes et de matériel entre Montréal ou Québec et le Labrador ou les principaux points de rassemblement de la côte est, les effrontés capitaines de sous-marin inscrivaient bien souvent dans leurs journaux que les feux de position des navires marchands et les bouées de navigation qui servaient à les guider, ainsi que les réverbères, les maisons et les phares sur la terre ferme, étaient allumés.

C’est ainsi que 11 membres d’équipage du Carolus périrent cette nuit-là. Dix-neuf autres furent sauvés.

Gräf fit plonger son bâtiment et, après un moment de jeu du chat et de la souris ponctué de grappes de grenades sous-marines, l’U-69 s’éclipsa furtivement en laissant dans son sillage l’émoi d’un naufrage à 300 kilomètres à peine de Québec. Gräf allait causer encore plus d’agitation au large de la côte ouest de Terre-Neuve.

À la Pointe Mitis, Octave Gendron retourna à un semblant de vie normale sur sa petite bande de terre qui se jetait dans le Saint-Laurent. Il fut gardien de phare à la Pointe Mitis pendant 18 ans, jusqu’en 1954.

David Gendron termina sa lettre d’amour à sa bienaimée, Simone Leblanc. Ils se marièrent, eurent sept enfants, et vécurent ensemble pendant 45 ans.

Leur fils Paul, désormais âgé de 76 ans, nous a confié que son père avait travaillé à la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada pendant 15 ans avant d’être directeur des Reford Gardens (Jardins de Métis), lieu historique national à Grand-Métis, Qc pendant 25 ans. 

Il souligna que les événements de cette nuit de 1942 étaient restés dans les annales de sa famille.

« La bataille du 9 octobre 1942 devant Métis a marqué la vie de la famille Gendron, explique-t-il dans une entrevue par courriel. 

« Mon grand-père Octave Gendron […] est décédé en 1975, et il nous parlait souvent de la bataille du Saint-Laurent. »

« La bataille du 9 octobre 1942 devant Métis a marqué la vie de la famille Gendron, explique-t-il dans une entrevue par courriel. Elle était dans la ligne de mire. »

Le gardien de phare Octave Gendron et son épouse, Eugénie, ont habité à la Pointe Mitis de 1936 à 1954.
Paul Gendron (2); Reford Gardens; Firefly Books

Lorsqu’il traversait le détroit de Cabot dans la nuit du 13 au 14 octobre, Gräf remarqua la fumée provenant de la cheminée du traversier Caribou. Le vaisseau du gouvernement voguait de Sydney, N.-É., à Port-aux-Basques, T.-N. Il était à 60 kilomètres du quai, et en plus des 46 membres d’équipage, il y avait 73 civils et 118 militaires à son bord. Il était 3 h 21.

L’Allemand a déclaré par la suite qu’il s’était mépris sur le traversier de 2 222 tonnes et son escorte, le dragueur de mines de 672 tonnes Grandmère, croyant qu’il s’agissait d’un transport de troupes de 6 500 tonnes et d’un « contretorpilleur à deux cheminées ». À 3 h 40, il lança une torpille qui percuta le flanc tribord du Caribou.

Le traversier coula en quatre mi-nutes, emportant 137 vies. Gräf plongea et se dirigea vers les bruits du naufrage, sachant qu’il ne serait pas attaqué à la grenade sous-marine par le Grandmère en restant à proximité des survivants en surface. Il finit par lancer un leurre et s’échapper.

Le lieutenant (M) James Cuthbert, capitaine du Grandmère, n’abandonna la poursuite pour aller à la recherche de survivants qu’à 6 h 30 : il s’agissait alors d’une priorité controversée, mais ainsi en allait-il de la procédure, et faire autrement aurait entrainé des risques pour son propre bâtiment.

Parmi les 11 enfants qui survécurent au naufrage du Caribou se trouvait Leonard Shiers d’Halifax, alors âgé de 15 mois. Sur les 46 membres de l’équipage, 15 seulement retrouvèrent la terre ferme. Cinq familles en particulier souffrirent énormément : Les Tapper (cinq morts), les Allen (trois), les Skinner (trois) et les Tavernor (le capitaine Benjamin et ses deux fils).

Les goélettes de pêche des environs affrétées par la Newfoundland Railway Company recouvrèrent 34 corps.

Le journal Royalist de St. John’s déclara que l’attaque avait été « un crime inutile ».

« Il n’aura aucun effet sur le cours de la guerre, sinon celui de renforcer notre détermination d’éliminer le nazisme, la honte de l’humanité, de notre monde », déclara-t-il.

À Port-aux-Basques, le 18 octobre, le cortège funèbre de six des victimes s’étendit sur deux kilomètres.

Des dizaines d’années plus tard, Norman Crane, ranger de Terre-Neuve qui avait pris part aux opérations de recherche des corps, dit à Nathan M. Greenfield, auteur de The Battle of the St. Lawrence, que la ville « d’à peu près 2 000 habitants » était sous le choc.

« En 1942, Port-aux-Basques ne ressemblait pas aux petites villes du continent, expliqua M. Crane. On aurait plutôt dit une ville du XIXe siècle. C’étaient des gens à la vie rude, comme on en trouvait dans beaucoup de collectivités côtières. Mais ils étaient également très respectueux.

« La perte du Caribou toucha Port-aux-Basques plus que ce qu’on pourrait imaginer de nos jours, poursuivit-il. Ben Tavernor n’était pas seulement le capitaine bien apprécié du Caribou, c’était un homme respecté qu’on savait dévoué à son bateau, et donc au lien avec le monde extérieur. Ses fils n’étaient pas que de bons vivants : ils étaient les fils de Ben Tavernor, et cela comptait pour beaucoup. »

Gräf et son équipage de 45 personnes allaient finir par disparaitre dans l’Atlantique Nord à l’est de Terre-Neuve au mois de février suivant.

À la fin de l’été 1942, les résidants des côtes du Québec ou de parties du dominion de Terre-Neuve, notamment le Labrador, étaient conscients des allées et venues des convois et de pratiquement tout autre objet flottant.

L’hôtelière Rachel Kruse pose avec des survivants (ci-contre) après que l’U-517 eut coulé trois vaisseaux au large du
Cap-Gaspé, Qc, en 1942.
Firefly Books

On peut parier que beaucoup de ces gens avaient été témoins de la guerre bien plus que la plupart des autres civils au Canada.

Les frappes sous-marines étaient devenues des événements presque familiers, bien que redoutés, de la vie, et voir des survivants imprégnés de mazout trainant péniblement des pieds en débarquant de toutes sortes de bateaux de sauvetage inspirait ces gens sinon assez isolés à donner le meilleur d’eux-mêmes.

Le 7 septembre, le futur as de la campagne du Saint-Laurent, le Kapitänleutnant Paul Hartwig de l’U-517, fit sombrer trois navires marchands au large du Cap-Gaspé : le Mount Pindus, l’Oakton et le Mount Taygetus, causant la mort de sept personnes. Quand il quitta le golfe, environ deux mois plus tard, il avait la perte de neuf bateaux à son actif.

Une grande partie des 78 sur-vivants qui retournèrent sur la terre ferme en fin d’après-midi ce jour de fête du Travail furent transportés à l’hôtel Kruse situé dans la ville de Gaspé, où ils furent pris en charge par Rachel Kruse, veuve d’Alfred, homme d’affaires prospère décédé en 1936.

On la surnommait à des lieux à la ronde « The Fighting Lady » (la dame combative, NDT) et son hôtel était devenu le centre de la petite collectivité où la musique et les boissons coulaient à flots, tout du moins jusqu’à ce que le marin pianiste reprenne la mer et y disparaisse.

Dès les premiers signes de l’arrivée de ces derniers invités inattendus (l’hôtel avait été réquisitionné par le gouvernement), Mme Kruse alla fouiller dans la grande boite de carton pleine de vêtements d’occasion qu’elle avait amassés en prévision.

Elle choisit des habits qui iraient à chaque personne, à une ou deux tailles près. Des clients de l’hôtel, principalement des résidants de longue durée qui travaillaient à la station de Fort Ramsay, laissèrent leur lit aux nouveaux venus : beaucoup étaient noirs de mazout et tremblants à cause de la froideur de l’eau.

Ils partirent le lendemain, et leur histoire a pratiquement disparu avec le temps, car les reportages censurés communiquèrent des faits sans s’y attarder.

« Personne au Canada n’aurait su que des clients inattendus étaient arrivés pendant la nuit, écrivit en 1984 le vétéran de la marine James W. Essex dans son livre Victory in the St. Lawrence. Quelqu’un prit une photo de Mme Kruse aux premières lueurs de l’aube, quand elle disait au revoir aux hommes qu’elle avait hébergés.

« Son fils Earl a fièrement affiché cette photo chez lui : on y voyait “la dame combative” entourée des hommes avec qui elle s’était liée d’amitié et qui portaient des vêtements mal ajustés, témoignant de sa détermination et de son bon cœur, mais elle ne fut jamais reproduite dans un journal, quel qu’il soit. »

Après qu’Hartwig envoya la corvette canadienne Charlottetown par le fond au large de Cap-Chat, Qc, quatre jours après, tuant 10 des 64 membres d’équipage, Dorothy German coucha les blessés sur le plancher de sa salle de séjour à Gaspé, « comme du bois de corde », décrivit Essex.

À un moment donné, un ordonnance sur le pas de la porte lui fit remarquer que les vêtements imprégnés de sang et de mazout allaient abîmer la moquette. Mme German ne s’arrêta pas.

« Ceux qui étaient dans l’eau lorsque les grenades sous-marines avaient explosé étaient les plus mal en point, écrivit Essex. Les secousses violentes font éclater les vaisseaux sanguins et causent une mort à petit feu.

« Les haut-le-cœur et l’expectoration de sang en sont des symptômes manifestes. »

Barry German, le mari de German, arriva peu après. Capitaine auxiliaire vétéran de la Grande Guerre, il était alors l’officier chargé de Fort Ramsay et le commandant auxiliaire de la flotte de Gaspé.

Il jeta un coup d’œil rapide aux blessés et ordonna qu’on les transporte tous à l’hôpital, où certains moururent. La plupart de ceux qui se rétablirent furent affectés à d’autres navires marchands : ils survécurent parfois à d’autres naufrages, ou non.

À Conception Bay, sur la côte est de Terre-Neuve, des U-boots firent sombrer cinq cargos près de l’ile Bell en septembre et en novembre 1942,
dont quelques-uns servaient au transport de minerai de fer provenant des mines de l’ile située au nord-est de St. John’s. Soixante-neuf marins marchands périrent.

Les habitants furent témoins de frappes contre le mouillage près de l’ile. Une torpille égarée explosa contre un des quais principaux. Pendant l’action, les résidants embarquèrent sur leurs bateaux pour se porter au secours des rescapés et récupérer les cadavres.

La guerre était donc toujours présente à l’esprit des gens qui étaient là, et à l’esprit des Terre-Neuviens en général. Il s’agissait après tout d’un peuple dont la vocation première était en mer, et au moins sept goélettes de pêche en Atlantique avaient été coulées par des sous-marins allemands près des côtes ou loin du pays.

Le 7 ou le 8 mai 1942, l’U-136 coula la goélette Mildred Pauline, dont le port d’attache était Sydney, au large de la Nouvelle-Écosse. Le Terre-Neuvien Abraham Thornhill en était capitaine. Le fils de Thornhill, George, âgé de 21 ans, faisait partie de l’équipage de sept marins. Tous périrent. 

Les U-boots envoyèrent par le fond des cargos appartenant à des Terre-Neuviens et dont les membres d’équipage étaient Terre-Neuviens, y compris le Humber Arm et le Waterton qui appartenaient à la Bowaters Newfoundland Pulp and Paper de Corner Brooks, ainsi que plusieurs vaisseaux appartenant à l’Anglo-Newfoundland Development Company dont le siège était
à St. John’s.

Dans les dossiers du ministère de la Justice de l’ancien dominion se trouvent des extraits de lettres écrites par des Terre-Neuviens lorsque de tels événements étaient encore bien présents à l’esprit.

Dans une lettre à Kay Normore, ancienne amie d’école se trouvant en Angleterre, Doris Higgins de Wabana, T.-N., décrivit de façon énigmatique les conséquences de la deuxième attaque à l’ile Bell qui avait eu lieu le lundi précédent, et la façon dont le médecin vint chercher son père à 4 h en lui disant « de se dépêcher, pour l’amour de Dieu, et d’aller chercher les blessés avec la fourgonnette.

« Il était déjà sorti de son lit parce que nous étions réveillés, tout comme quiconque sur l’ile Bell avait des oreilles », écrivit-elle avant de poursuivre en décrivant « une vision impressionnante et douloureuse » de 11 cortèges funéraires traversant la ville quelques jours après.

Elle essaya de dissuader son amie de rentrer au pays « par la voie maritime ».

« C’est trop dangereux, écrivit Higgins, et Kay, ma chère, nous, ici, le savons que trop bien. »

Au bout du compte, la bataille du Saint-Laurent ne fut ni gagnée ni perdue. À l’automne 1944, les sous-marins allemands quittèrent simplement le golfe pour les eaux de l’Atlantique aux proies plus nombreuses.

Peu connus ailleurs au pays, les événements extraordinaires de 1942 restent bien présents dans les esprits des Canadiens de l’Atlantique, marqués par des histoires, des monuments et des tombes, ainsi que des souvenirs, des mythes et des légendes. 

 

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