Le voyage à l’origine de la création du Tombeau du Soldat inconnu

Il y a presque un quart de siècle, la Légion royale canadienne a joué un rôle de premier plan dans la création d’un Tombeau du Soldat inconnu au Canada. La dépouille d’un soldat canadien non identifié de la Première Guerre mondiale a ainsi été inhumée à nouveau avec les honneurs militaires lors d’une cérémonie au Monument commémoratif de guerre du Canada à Ottawa le 28 mai 2000, évènement qui allait changer le visage du souvenir au Canada.

En 1996, le brigadier-général à la retraite Duane Daly assista à une conférence en Afrique du Sud dans le cadre de l’une de ses premières fonctions en tant que secrétaire de la Légion. Daly, vétéran de l’Aviation royale du Canada, n’avait jamais foulé le lieu sacré qu’est un cimetière de champ de bataille canadien. Ceux sur lesquels il se rendit en Afrique du Sud ne ressemblaient pas à ce à quoi il s’attendait.

La Légion a reprise l’idée.

Il plongea dans le rôle du Canada à la guerre d’Afrique du Sud et partit à la recherche de tombes militaires canadiennes près de Cape Town. Il trouva des victimes de guerre enterrées là où elles avaient péri, leurs caveaux (bien souvent des tombes toutes seules dans les champs) marqués de pierres de granit qui avaient servi de ballast dans le navire à bord duquel les soldats avaient été transportés.

« Les lieux pouvaient sembler vides, sauf qu’au milieu d’un pré, on voyait tout d’un coup un gros morceau de granit, la pierre tombale d’un soldat canadien, nous explique M. Daly. Tout cela m’a profondément marqué. Cela a fait vibrer en moi la corde du souvenir. »

À son retour au Canada, M. Daly a proposé de créer un Tombeau du Soldat inconnu au Monument commémoratif de guerre, à Ottawa. La Légion a repris l’idée. M. Daly a recueilli du soutien et l’aide d’experts, et il a fini par réaliser ce qui lui a parfois semblé infaisable.

Tom MacGregor/Archives de la revue Légion

Le Royaume-Uni et la France avaient consacré leurs tombeaux le jour de l’Armistice en 1920. Plus de 50 pays, dont les États-Unis, les avaient imités. Mais, pas le Canada.

M. Daly se demandait bien pourquoi, alors il mena sa petite enquête. Ses recherches l’amenèrent à une conclusion simple : aucun gouvernement canadien n’avait « jamais exprimé le souhait de rendre ce genre d’hommage aux anciens combattants […]. Ils trouvaient suffisant de dire que le tombeau du guerrier inconnu [de la Grande-Bretagne] servait à l’ensemble du Commonwealth. »

Le budget initial était de 500 000 $. Il a finalement été de près de 2 millions de dollars, somme provenant en grande partie du Trésor fédéral, malgré le manque d’appui du Cabinet. M. Daly explique que les budgets de certains ministères avaient été établis de manière à le financer adéquatement. 

La liste des contributeurs est longue; toutefois, M. Daly nomme trois fonctionnaires qui ont été les principaux partisans de l’initiative : Gerry Wharton, directeur de la cérémonie aux Travaux publics et Services gouvernementaux, qui a élaboré la conception; Brad Hall, de l’Agence canadienne de la Commission des sépultures de guerre du Commonwealth, qui a orchestré la récupération de la dépouille à Vimy, en France; et Marc Monette, directeur des Travaux publics de la cité parlementaire, qui a supervisé la construction de la tombe et sa mise en place. Il a également dirigé le concours de conception, remporté par l’artiste canadienne Mary-Ann Liu.

Il était essentiel de porter une attention minutieuse aux détails, qui allaient du choix du granit provenant de la même carrière québécoise que le reste du monument, à la recherche d’un affut de canon approprié pour transporter la dépouille de la Colline du Parlement jusqu’à son dernier lieu de repos. La GRC a fourni un affut de canon et une escorte montée pour le cortège funèbre.

La stèle originaire du soldat a été transportée de la concession 8, rangée E, tombe 7 du cimetière britannique de Cabaret-Rouge, en France, au nouveau Musée canadien de la guerre. Elle a été placée dans une pièce spéciale où, à 11 heures chaque jour du Souvenir, un rayon de soleil entre par une fenêtre étroite et l’illumine.

Aujourd’hui, le Tombeau du Soldat inconnu est au centre de l’attention des spectateurs et participants de la cérémonie annuelle du jour du Souvenir. Après les cérémonies d’usage, une procession solennelle se forme et, un par un, des coquelicots sont placés sur la tombe, la couvrant ainsi de rouge. 

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