Pélerinage en Turquie: Retour à Gallipoli

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Le lieutenant J.J. Donnelly La Croix militaire a été décernée au lieutenant pour ses actions à la Caribou Hill, à Gallipoli.
The Rooms Provincial Archives Division/VA36-1.4

Le Newfoundland Regiment est la seule
unité militaire d’Amérique du Nord qui se
soit battue à la campagne franco-britannique
couteuse de Gallipoli, au crépuscule
de l’Empire ottoman


Peu après
avoir débarqué à Gallipoli, en septembre 1915, le Newfoundland Regiment s’est retrouvé immobilisé à la guerre de tranchées, harcelé constamment par les tireurs d’élite.

En particulier, le major T.M. Drew, commandant intérimaire, en avait aperçu un situé sur un monticule à mi-chemin entre les tranchées ennemies. Il prenait position au crépuscule
et attendait la nuit pour choisir ses cibles, puis il repartait avant le jour. Drew a donné l’ordre de débarrasser le régiment de cette menace.

C’est ainsi que, l’après-midi du 4 novembre, le lieutenant J.J. Donnelly a mené six hommes et un sous-officier à un poste abandonné hors de vue de l’ennemi. C’était alors au tour des Terre-Neuviens d’attendre.

Au déclin du jour, non pas un, mais trois tireurs turcs se sont mis en marche vers leur position. Un échange de coups de feu a eu lieu lorsque les Terre-Neuviens leur ont fait une sommation, et deux des tireurs ont été tués. Le troisième a riposté et blessé un des Terre-Neuviens.

Une deuxième patrouille, menée par le lieutenant H.H.A. Ross, a été envoyée en renfort, mais elle est tombée sur une patrouille turque qui essayait d’encercler le groupe de Donnelly dans le noir. Un deuxième échange de coups de feu a eu lieu. Le soldat James Ellsworth a été tué, tandis que Ross et d’autres ont subi de légères blessures avant d’obliger l’ennemi à se replier. La position des Terre-Neuviens a été renforcée au lever du jour, et le nom de Caribou Hill lui a été donné d’après l’emblème qui se trouve sur l’écusson du régiment.

Avant la fin de l’année, la Croix militaire a été décernée à Donnelly et la Médaille de conduite distinguée à deux autres pour leurs actes cette nuit-là.

La découverte de
la fameuse Caribou Hill
a été un point fort
du pèlerinage.

 

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Caribou Hill Le lieutenant-colonel Thomas Nangle visite la Caribou Hill en 1921.

Trouver Caribou Hill

« Pendant longtemps, les historiens pensaient que l’emplacement véritable de Caribou Hill était introuvable », dit l’historien Frank Gogos à une délégation de Terre-Neuve qui visitait la Turquie en septembre. « Le régiment a quitté Gallipoli et il ne restait pas de repère indiquant le site. »

Mais M. Gogos s’est servi de vieilles cartes, de notes écrites à la main et d’archives. Avec l’aide d’un topographe de l’université Memorial de St. John’s, il a découvert qu’une des routes du parc historique national de la péninsule de Gallipoli mène à la fameuse colline.

M. Gogos a guidé l’autocar transportant la délégation et un autre où se trouvaient des membres du Royal Newfoundland Regiment d’aujourd’hui jusqu’à l’endroit qu’il avait localisé avec précision. Le groupe s’est mis à explorer le secteur et a trouvé les ruines d’un petit édifice. Un des soldats a trouvé une cartouche de fusil par terre parmi les mauvaises herbes.

« Ça pourrait être une cartouche de 303 ou de Mauser 7×57 mm [turc]. Il n’y a qu’un millimètre de différence », dit M. Gogos. Il n’est pas certain que l’endroit soit bel et bien celui où se sont passées les actions héroïques il y a 100 ans, mais M. Gogos est persuadé qu’il peut le prouver.

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Des membres du pèlerinage du Newfoundland redécouvrent la côte en 2015.
Tom MacGregor

La découverte de la fameuse Caribou Hill a été un point fort du pèlerinage des membres du Conseil consultatif du Royal Newfoundland Regiment (RNRAC), organisme sans but lucratif formé de bénévoles qui vise à encourager l’appui du régiment et de son histoire, et d’Honour 100, une direction du ministère des Affaires, du Tourisme, de la Culture et du Développement rural de Terre-Neuve-et-Labrador. La délégation était dirigée par le président du RNRAC, Ron Penny et le sous-ministre Alastair O’Rielly. L’ancien lieutenant-gouverneur de Terre-Neuve-et-Labrador, John Crosbie et son épouse Jane en faisaient aussi partie. En tant que lieutenant-gouverneur, Crosbie est automatiquement colonel honoraire du régiment.

Trois des pèlerins étaient respectivement le fils et les petits-fils de militaires qui se sont battus à Gallipoli : Neil Harvey, médecin de Grand Falls/Windsor, Ken Gatehouse de St. John’s, ancien secrétaire de division de la Division de Terre-Neuve-et-Labrador de la Légion royale canadienne, et Christopher Morry d’Ottawa. Elinor Ratcliffe, qui a fait un don de 3,2 millions de dollars servant à une exposition concernant le régiment à The Rooms, collection d’archives de la province, et John Perlin, ancien secrétaire canadien de la Reine, étaient aussi du nombre. D’autres, comme Reginald Snow et Terry Hurley, sont des vétérans du régiment.

Le groupe, dont les membres venaient de St. John’s, d’ailleurs au Canada ou du Royaume-Uni, est arrivé à Istanbul, en Turquie, le 15 septembre. Après quelques nuits à Istanbul, ils ont pris leurs quartiers à un hôtel d’Eceabat, à 300 kilomètres à l’ouest de la péninsule de Gallipoli.

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Gallipoli La péninsule de Gallipoli se trouve du côté européen du détroit des Dardanelles.
Jamie McLennan, Character Creative/Revue Légion

Le détroit des Dardanelles, qui sépare l’Europe – et Gallipoli — de l’Asie Mineure, a une importance stratégique depuis les temps anciens, car il mène à la mer de Marmara et à Istanbul. Il était important pour les Britanniques pendant la Première Guerre mondiale, parce que c’était la seule voie navigable pour le transport de provisions allant de la Méditerranée
à la mer Noire et plus loin, en Russie. Le détroit est encore important aujourd’hui en tant que seule voie que puisse emprunter la marine russe pour se rendre en Méditerranée. Ces jours-ci, bien sûr, la Turquie est notre alliée et membre de l’Organisation du Traité de l’Atlantique-Nord.

La première cérémonie officielle du voyage a eu lieu le matin du 19 septembre, en commémoration de la nuit fatidique où le régiment a débarqué dans la baie de Suvla. La délégation a été rejointe par une garde d’honneur du régiment, au cap Helles, à l’endroit balayé par les vents où les forces britanniques et françaises ont débarqué en 1915. Le monument de Helles est un obélisque de 30 mètres commémorant 20 885 soldats et marins du Commonwealth qui ont fait la Première Guerre mondiale et à qui on ne connait pas de tombe. Leurs noms sont gravés dans la pierre blanche. Le Newfoundland Regiment y figure, sous l’enseigne des « unallotted troops » (troupes non attribuées, NDT).

« En 1914, Terre-Neuve était un dominion indépendant du Canada, dit Penney, et dans le cadre de ce qu’on appelle notre premier effort national, il a constitué un régiment et l’a entretenu pendant les quatre longues années de la Grande Guerre. Plus de 6 000 Terre-Neuviens se sont enrôlés dans le régiment et plus de 12 000 ont pris part à l’effort militaire en tant que membres d’autres forces, sur mer ou sur terre. Plus de 1 500 d’entre eux ont fait le sacrifice suprême. »

Un trompète du régiment a joué la « sonnerie aux morts » alors que le vent soufflait autour du monument, puis il y a eu le silence et « le réveil ». Melanie Martin, qui est à la tête du projet Honour 100, a alors dirigé le chant de l’hymne provincial officiel, « Ode to Newfoundland ». Le major Shawn Samson, aumônier du régiment, a prononcé la bénédiction.

La délégation est restée à Eceabat pendant cinq jours, pour assister à des commémorations dans les cimetières militaires avoisinants, qui sont entretenus irréprocha-blement par la Commission des sépultures de guerre du Commonwealth (CSGC), et pour aller voir les plages où le régiment a débarqué et où il s’est distingué pendant les évacuations, non pas une, mais deux fois.

À peine 60 ans auparavant,
l’Empire ottoman avait été
un allié de la Grande-Bretagne
pendant la guerre contre
la Russie en Crimée

 

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Il est situé dans un parc au cap Helles qui donne sur la mer Égée.
Tom MacGregor

L’ouverture d’un autre front

Au printemps de 1915, la guerre que certains espéraient voir finir avant Noël 1914 s’était enlisée dans les tranchées au front occidental et au front oriental. Le Cabinet de guerre britannique tentait de se mettre d’accord sur l’ouverture d’un autre front pour affaiblir les forces ennemies sur le front occidental afin d’aboutir à une vraie percée.

Winston Churchill, qui était alors premier lord de l’amirauté britannique, était en faveur d’une offensive navale au détroit des Dardanelles pour aller capturer Istanbul, qui s’appelait alors Constantinople, et obliger l’Empire ottoman à quitter la guerre (« Face à face », novembre/décembre 2015). Cela permettrait aussi aux Alliés d’envoyer des provisions et des armes à la Russie pour le combat au front oriental.

À peine 60 ans auparavant, l’Empire ottoman avait été un allié de la Grande-Bretagne dans la guerre contre la Russie en Crimée. Au tournant du siècle, la Russie était devenue l’alliée de la Grande-Bretagne, tandis que les Allemands avaient investi dans un empire qui était surtout agricole. L’Allemagne avait construit la voie ferrée Orient Express et une gare magnifique à Istanbul, mais en 1914, l’Empire ottoman s’effondrait, ayant perdu une grande partie des territoires qu’il avait contrôlés en Europe et en Afrique. Quand la guerre a éclaté, il s’est joint à l’Allemagne et à l’Empire austro-hongrois.

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Le mémorial de Helles sert à rendre hommage aux militaires du Commonwealth sans tombe connue.
Tom MacGregor

Le cabinet britannique a accepté l’offensive aux Dardanelles à contrecœur. Lorsque la Marine royale a lancé son attaque, le 18 mars 1915, les forces turques, juchées sur des fortifications au sommet des montagnes ont ouvert le feu. Trois navires ont été coulés par les mines et l’artillerie. La flotte a dû se replier. Pour que l’attaque puisse réussir, les fortifications allaient devoir être d’abord prises par l’armée.

Le 15 avril 1915, les forces britanniques, accompagnées par des corps d’armée d’Australie et de Nouvelle-Zélande, se sont battues sur cinq plages du cap Helles, à la pointe sud de la péninsule. Leur objectif était de capturer Achi Baba, sur la partie montagneuse la plus haute de la péninsule. L’Empire ottoman, en confiance après sa victoire navale, a déployé son armée pour résister aux envahisseurs. Ironie du sort, un grand nombre des forteresses utilisées par les Turcs avaient été renforcées par les forces britanniques au XIXe siècle.

Les Alliés ont lutté pour atteindre les hauteurs, mais comme leurs camarades en Europe du Nord-Ouest, ils se sont vite enlisés dans une guerre de tranchées.

Les 1 076 soldats du Newfoundland Regiment ont été envoyés à la baie de Suvla pendant la nuit du 19 au 20 septembre. Le régiment qui se trouvait à bord du Navire de Sa Majesté Prince Abbas est descendu dans des péniches et a mis pied à terre à la faveur de la nuit, mais quand le jour s’est levé, il a vite été vu et les armes ennemies l’ont pris en mire. Le 22 septembre, le soldat Hugh McWhirter, âgé de 21 ans, a été le premier membre du régiment tué au combat. Le lendemain, un tireur d’élite à tué le soldat William Hardy, âgé de 22 ans.

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The Rooms Provincial Archives Division/VA37-1.3;
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Des membres du Newfoundland Regiment prennent place dans des tranchées à la bais Suvla en 1915.
The Rooms Provincial Archives Division/VA37-1.1

À la fin du mois, le régiment avait remplacé les Britanniques sur plus de 1,5 kilomètre de leur première ligne. Par endroits, il ne se trouvait qu’à 50 mètres des lignes turques. La routine était de quatre jours dans les tranchées, suivis par huit jours dans les tranchées-abris, puis retour aux tranchées. Après quelques mois, les rangs ayant été réduits, les hommes étaient obligés de passer huit jours dans les tranchées puis quatre jours dans les tranchées-abris.

Les conditions étaient terribles, les insectes si nombreux qu’ils couvraient entièrement ce que les soldats avaient à manger. Les nuits étaient froides et il y a eu une tempête en novembre qui a inondé les tranchées et causé de nombreuses engelures.

Pendant ce temps, la Bulgarie s’était jointe aux empires centraux (l’Allemagne, l’Autriche-Hongrie et l’Italie), et la Serbie risquait d’être envahie à tout moment. Si elle tombait, l’Allemagne aurait un service ferroviaire ininterrompu jusqu’à Constantinople et pourrait envoyer une artillerie qui serait supérieure aux forces alliées.

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Aujourd’hui, la baie de Suvla fait partie d’un parc historique national.
Tom MacGregor

Le cabinet britannique a accepté d’évacuer entièrement la péninsule le 23 novembre. Le régiment a commencé par évacuer ses malades. Ensuite, les outils pour creuser les tranchées et les fournitures en surplus ont été envoyés aux plages. Les hommes ont finalement été évacués au cours de deux journées. La marine a appuyé l’évacuation en bombardant de nouveaux secteurs pour déconcentrer les Turcs. Pendant ce temps, une arrière-garde du Newfoundland Regiment faisait croire aux Turcs que le régiment était toujours là au grand complet. Des fusils sans tireur étaient installés en mettant une boite de sable sur la gâchette. Une boite d’eau qui fuyait était placée au-dessus de la boite de sable. Quand le poids du sable mouillé atteignait sept livres, le fusil faisait feu, ce qui faisait croire aux Turcs qu’un tireur était à l’œuvre.

Il n’y eut aucune victime pendant l’évacuation. Quand le régiment arriva à l’ile d’Imbros, à 15 kilomètres de là, les hommes pensaient qu’ils auraient un repos bien mérité, mais moins de deux jours après, ils reçurent l’ordre de retourner au cap Helles pour l’évacuer. Cette fois-là, le régiment est arrivé à la plage W, aujourd’hui appelée Lancashire Landing.

Le régiment a remplacé les Britanniques dans leurs tranchées et les a rendues aussi confortables que possible. La Noël fut célébrée au moyen d’une gorgée de rhum supplémentaire pour accompagner le bœuf salé en conserve et les biscuits. Au début de l’évacuation de Helles, des ouvriers grecs engagés pour le transfert ont regimbé sous les coups de feu, et les Terre-Neuviens ont dû assurer le débardage pour monter les provisions à bord des navires.

Une fois de plus, des membres du Royal Newfoundland Regiment sont restés sur place en tant qu’arrière-garde pour convaincre l’ennemi que les lignes étaient encore défendues. Quand les derniers soldats se sont retirés, la nuit du 9 janvier 1916, ils ont détoné les magasins de munitions abandonnés sur la plage, dupant de nouveau l’ennemi.

Le conflit de Gallipoli a fait 56 707 morts et 123 598 blessés parmi les forces alliées, et 56 643 morts et 107 007 blessés côté ottoman. D’après Anciens combattants Canada, le décompte final concernant le Newfoundland Regiment est de 49 morts et 93 blessés.

Commémorations sur terre et sur mer

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Le sous-ministre Alastair O’Reilly (à g.) et le président du Conseil consultatif Ron Penney se préparent à déposer une couronne à la mer à la plage Kangaroo.

À la cérémonie balayée par les vents au monument de Helles se trouvait également M. Ahmet Cinar, gouverneur de Çanakkale, une des 60 provinces de la Turquie. Les deux côtés du détroit des Dardanelles font partie de Çanakkale, et même les ruines de Troie.

En retour de sa visite, la délé-gation s’est rendue au monument commémoratif turc, une immense structure de quatre colonnes que l’on peut voir aisément depuis un navire entrant aux Dardanelles. Le monument est dédié aux 250 000 soldats turcs qui ont pris part aux batailles. Les colonnes sont décorées de bas reliefs représentant les batailles, et un cimetière où gisent quelque 500 Turcs se trouve non loin de là. Des statues impo-santes ont été érigées à l’entrée.

Le gouverneur Cinar a fait écho, en turc, aux mots du grand héros turc Mustafa Kemal Atatürk. « Vous héros, qui avez versé votre sang sur le sol de ce pays, vous gisez en pays ami. Ici, donc, reposez en paix. Vous gisez avec les ehmetcik [soldats turcs], côte à côte, dans les bras les uns des autres. Vous, les mères qui avez envoyé vos enfants en pays lointain, séchez vos larmes, vos fils sont en paix; et ils reposeront en paix, ici, à jamais. Quand ils ont perdu la vie sur cette terre, ils sont devenus nos fils également. »

Après une simple cérémonie de dépôt de couronnes, les officiels turcs se sont joints au régiment à l’occasion d’un diner offert par la direction de l’Honour 100.

La délégation s’est jointe au régiment après le repas, lors d’un service au cimetière de Lancashire Landing, non loin de la plage W, où le Lancashire Fusiliers a mis pied à terre le 25 avril. Il a débarqué sous un feu nourri et a quand même réussi à prendre les falaises qui l’entouraient. Six Croix de Victoria ont été décernées à des membres du bataillon, un exploit qui a été annoncé par la formule « six Croix de Victoria avant de déjeuner ».

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Les restes de la coque d’une péniche (encart) utilisée pour le transport d’hommes et de provisions entre les navires et la côte.

Ici, les pèlerins de Terre-Neuve ont cherché les pierres tombales des trois Terre-Neuviens qui y sont ensevelis. Samson a dirigé un petit service pendant lequel il a nommé les Terre-Neuviens et déposé une couronne.

Les cimetières de Gallipoli sont bien différents de ceux que l’on voit en France, en Belgique et en Italie. La CSGC en prend grand soin, mais le sol est trop détrempé pour pouvoir supporter la pierre tombale habituelle du Commonwealth. À la place, il y a un piédestal pour marquer la tombe, avec une plaque de pierre dessus. Une croix murale est utilisée à la place de la Croix du Sacrifice habituelle.

L’Imperial War Graves Commission, ancêtre de la CSGC, n’a eu accès à Gallipoli qu’après la fin de la guerre. En conséquence, la commission a dû se servir de cartes où étaient marquées les tombes creusées en situation de combat. L’emplacement de ces sépultures est indiqué sur les plans des cimetières, mais les tombes ne sont pas marquées sur le terrain. Il y a beaucoup de tombes qu’on n’a pas pu identifier. Les cimetières comprennent souvent de grands espaces parsemés de tombes connues mais non identifiées. Un grand nombre d’indicateurs ont un nom suivi de l’inscription : « enterré, croit-on, dans ce cimetière ».

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De garde Des membres du Newfoundland Regiment gardant leur camp en uniforme de la guerre d’Afrique du Sud.
Canadian Centre for the Great War

Le lendemain, une dernière cérémonie a eu lieu au cimetière de Lone Pine, en haut d’un plateau d’importance stratégique. Le major Samson a dirigé à nouveau un simple service comprenant « la sonnerie aux morts », le silence et « le réveil », puis l’hymne « Ode to Newfoundland ».

À la fin, le sergent-major régimentaire, Wayne Allen, s’est adressé aux soldats. « Pour la première fois depuis 1915, le régiment est venu à Gallipoli et a rendu hommage aux compagnons d’armes qui sont tombés ici. Le moment est venu de rentrer chez nous. »

Après le départ du régiment, la délégation est allée voir la plage Kangaroo, où les Terre-Neuviens ont débarqué pour la première fois, et qui est maintenant un endroit populaire pour la pêche et la plongée. Ici a eu lieu une autre cérémonie simple : M. O’Rielly, assisté de M. Martin, a lancé une couronne à la mer. Quand elle a percuté les rochers, un plongeur en combinaison l’a gentiment poussée vers le large.

Neil Harvey se souvient de son père, William Thomas Harvey en se promenant sur la plage. « Mon père ne parlait pas de la guerre, » dit-il. Neil, qui voyageait avec son fils Andrew, a appris les expériences qu’a eues son père à la guerre dans les archives de Terre-Neuve, surtout dans The Rooms. Son père avait at-trapé la tuberculose quand il servait à Gallipoli, et il avait été renvoyé à Londres pour cause de maladie, puis finalement à Terre-Neuve. Il a quand même eu une vie bien remplie. Neil est le plus jeune de ses huit enfants.

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Des membres de la délégation et du Royal Newfoundland Regiment se rassemblent au mémorial de Helles.
Bradbury Family Fonds

Christopher Morry d’Ottawa a rédigé une notice biographique sur son grand-père, Howard Morry. « Nous avons découvert après sa mort que mon grand-père avait un journal. Ce n’étaient que des bulletins sur la météo et les marées, mais à l’occasion, quand il avait le temps, il y consignait des souvenirs qu’il avait de la guerre. » M. Morry dési-rait particulièrement trouver la tombe de David Carew qui est enterré au cimetière Hill 10. « Davy avait 16 ans quand il s’est enrôlé, et il n’avait que 18 ans quand il est arrivé ici. Mon grand-père avait 31 ans
en ce temps-là, et Davy restait près de lui; ils partageaient même une couverture pendant la nuit. Il semblait penser qu’il serait en sécurité près du vieil homme. Cependant, mon grand-père a été envoyé en mission. Et en effet, un tireur d’élite a atteint Davy d’une balle. »

Un sixième caribou?

Après les cérémonies officiel-les, M. O’Rielly, accompagné de MM. Penney et Martin, est allé voir le gouverneur Cinar à Çanakkale, capitale de la province. M. O’Rielly s’est contenté de qualifier la conversation de positive, mais on sentait un certain espoir parmi les membres de la délégation.

Le lieutenant-colonel Thomas Nangle, qui était aumônier du régiment pendant la Grande Guerre, a plus tard représenté Terre-Neuve au sein de l’Imperial War Graves Commission. On lui doit entre autres la création des cinq monuments en France et en Belgique qui ont un caribou en l’honneur des Terre-Neuviens ayant servi si vaillamment à la Première Guerre mondiale.

« Nangle voulait six monuments caribou, le dernier à Gallipoli, dit M. Gogos. Mais après la guerre, l’Empire ottoman s’est écroulé et il y a eu une guerre civile en Turquie. Il n’avait pas accès à la Turquie, et le monument n’a jamais été construit. »

Maintenant que le site de Caribou Hill est identifié, peut-être un caribou se tiendra-il un jour sur ces côtes balayées par les vents, pour représenter les gens venus d’un petit dominion qui se sont distingués par leur service.

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