Chaque année, dans tous les coins du Canada, une foule d’enseignants, de jeunes et de légionnaires font fleurir les arts au nom de la commémoration, donnant ainsi vie aux concours littéraires et d’affiches de la Légion.
En 2014, des milliers d’élèves de partout au pays, de Corner Brook à Cranbrook, ont travaillé dur et longtemps pour déterminer ce que le souvenir signifiait exactement pour eux, et ils se sont ensuite efforcés d’exprimer ce sentiment dans une œuvre d’art. Les poèmes, les compositions et les affiches qu’ils ont créés ont été évalués aux niveaux local, régional et provincial jusqu’à ce que quelques inscriptions exceptionnelles atteignent le premier rang au niveau national.
À partir du niveau primaire, en passant par le junior et l’intermédiaire, et jusqu’au sénior, les œuvres produites par ces élèves sont aussi variées que possible, bien que le même thème revienne.
La gagnante en poésie chez les séniors, Sarah Jessica Butler, âgée de 16 ans, de Torbay (T.-N.) le résumait ainsi : « la source d’inspiration pour mon poème, c’est que les jeunes d’aujourd’hui ne peuvent pas avoir beaucoup d’affinités avec la guerre. Bien qu’on puisse avoir de la famille impliquée, nous n’avons pas d’expérience directe des champs de bataille ni de toutes leurs tragédies. J’ai pensé qu’exprimer à quel point nous les jeunes avons peu d’affinités serait un moyen efficace de montrer à quel point la participation passée de nos pays est importante. »
Son poème The Lucky Ones est un examen magnifiquement structuré du fossé qui existe entre les jeunes et les gens qui servent ou qui ont servi.
6 h; nos réveille-matins sonnent,
nous sommes debout pour la journée
Je m’habille pour aller à l’école,
vous vous préparez pour une
longue journée au travail
Je prends l’autobus, vous montez
dans un char d’assaut, tous deux
vers un endroit où nous
préfèrerions ne pas aller.
La suite du poème sert à examiner les sentiments intenses de ce soldat qui se tient debout près de Butler à la cérémonie du jour du Souvenir de son école, pendant le moment de silence, tandis que Sarah ne ressent pas du tout la même chose.
Alors que nous observons un moment de silence,
votre esprit retourne au champ de bataille comme un éclair,
Le mien, aux images de mon livre d’histoire.
Les coups de fusil, les cris, vous êtes sur ce champ de bataille,
Je suis dans un gymnase bondé à écouter les sons du silence.
Je ne ressens pas d’explosion près de moi, je n’ai pas d’arme à feu à la main,
Je suis une élève d’une école, les bras chargés de livres.
Le silence se poursuit et vous êtes toujours sur ce champ de bataille.
Je suis toujours dans ce gymnase où j’essaie de ressentir quelque chose,
quoi que ce soit, Absolument rien.
Pour Butler, la tragédie de la guerre est aggravée par le fossé qui existe entre les gens qui y ont été et ceux qui n’y sont pas allés. « Grandir dans un environnement paisible et avoir très peu de soucis ainsi qu’une abondance de choses que l’on considère comme allant de soi rend incroyablement difficile la compréhension de ce que les soldats ont vécu, dit-elle. Bien que j’aie suivi des cours d’histoire, je ne comprends pas vraiment à quel point c’était tragique, alors je pense que mon poème est une juste expression du manque de
connexion qui est frustrant. »
Le poème de Butler explique qu’elle se rend compte qu’elle a des liens avec le soldat.
Nous sommes debout tous les deux
alors que la sonnerie aux morts est jouée fièrement.
Je ne saisis peut-être pas bien,
mais j’incline quand même la tête
Pour ce moment de silence en souvenir de ceux
Qui ne sont pas rentrés chez eux tel jour,
qui n’ont jamais revu leur famille.
Une éducation, une maison sure,
je suis l’une des plus chanceuses.
Une famille, plus de coups de feu,
vous êtes l’un des plus chanceux.
En ce moment, nous sommes finalement pareils.
Nous sommes ici, nous sommes vivants,
nous sommes les plus chanceux.
Pour Butler, le lien est un aspect important du Souvenir, mais il y en a d’autres aussi. « Je pense que le souvenir est quelque chose que tout le monde devrait prendre le temps de comprendre ne serait-ce que pendant un moment de silence le jour du Souvenir, ou si l’on fait plus d’efforts, se souvenir de nos soldats tombés au combat, du courage et de la force de ces jeunes hommes et femmes qui ont donné leur vie (littéralement, et même s’ils ont survécu, ils souffrent encore de leurs souvenirs) est quelque chose que nous devrions tous admirer et respecter, dit-elle. Après avoir visité de nombreux cimetières en Europe et vu combien d’inconnus il y a, il m’a été de plus en plus facile de voir comment ces soldats pourraient être oubliés. Je pense donc qu’en prenant le temps de réfléchir et de nous souvenir, nous donnons à ces vies inconnues, et même aux connues, une lueur d’appréciation et de respect qui leur permet de vivre éternellement. »
Pour Darynn Bednarczyk de Cranbrook (Colombie-Britannique), âgée de 17 ans, qui a remporté le concours d’affiches en noir et blanc sénior grâce à la représentation émouvante de son grand-père ancien combattant, le souvenir est une question personnelle d’une importance extrême. « Le jour du Souvenir a toujours été très important pour moi et pour ma famille, dit-elle. Il est très important de remercier ceux qui ont combattu et perdu la vie pour nous. Nous avons une dette envers ces personnes, et les tenir un instant dans notre esprit, c’est la moindre des choses. Tout ce qu’il y a autour de nous aujourd’hui, nous le devons à ces soldats qui ont risqué leur vie. Ils nous ont donné la liberté, et nous la tenons souvent pour acquise. Je suis touchée au cœur quand je vois le monde se réunir pour se souvenir rien que de cela, pour prendre juste une fraction du temps de nos vies occupées et rendre grâce et se souvenir des morts. Ce sont des héros, et ils méritent d’être reconnus comme tels. »
L’affiche de Bednarczyk est composée de scènes prises dans des albums familiaux qui montrent son grand-père, Stanley Bednarczyk.
« Cette affiche est un hommage à mon grand-père, dit-elle. Toutes les photos à gauche sont des photos de notre album de famille et mon grand-père figure dans la plupart d’entre elles. J’ai aussi inclus sa photo où, jeune soldat, il porte l’uniforme polonais. J’ai reproduit ses médailles de guerre aussi. À droite, c’est son portrait d’ancien combattant où il porte l’uniforme de la Légion canadienne. Il a toujours été si fier de porter ses médailles et son uniforme à la cérémonie communautaire du jour du Souvenir. »
Son grand-père, fier légionnaire dont les expériences ont inspiré Darynn, a servi à la Seconde Guerre mondiale. « L’armée russe l’avait envoyé en Sibérie, aux camps de travail, à 15 ans, dit-elle. Après deux ans, il s’est engagé dans l’armée polonaise et a été membre du 2e Corps polonais. Il a reçu une formation de chauffeur de chenillette porte-Bren et a travaillé en Iran, en Irak, en Syrie, au Liban, en Israël et en Égypte en préparation à la bataille du Monte Cassino. Sur une équipe de dix, seuls lui et un autre ont survécu à la bataille. »
En effet, un grand nombre de présentations au concours de cette année ont le thème du souvenir d’un membre de la famille qui a servi ou qui est décédé. Pour Bednarczyk, cet aspect a donné un sens à son travail, peu importe qu’elle remporte le concours ou pas. « Prendre grand-papa comme sujet a élevé l’affiche d’un cran et l’a rendue éloquente pour ma famille et pour le concours, dit-elle. Je savais, quand j’ai terminé l’affiche, qu’elle était réussie rien qu’à voir la réaction de mon père; le classement obtenu par la suite, c’était juste un bonus. »
Comme récompense, Bednarcyzk et Butler se joindront aux deux autres gagnants des concours séniors, l’essayiste Hareem Masroor de Nanaimo, en Colombie-Britannique, et Joo Hee Chung, de Langley, en Colombie-Britannique, dont l’affiche en couleurs a été choisie, pour la cérémonie du jour du Souvenir de 2014 à Ottawa. Les quatre gagnants auront non seulement la chance de rencontrer le gouverneur général, mais ils déposeront une couronne au Monument commémoratif de guerre au nom de tous les jeunes Canadiens.
« C’est un honneur d’avoir cette opportunité, a déclaré Bednarcyzk. Je ne pourrais pas être plus heureuse! Mon art m’a fait aller si loin, et c’est fou d’être reconnue à l’échelle nationale. J’ai gagné ce concours pour grand-papa, et il aurait été si fier de moi. Je ne serais pas ici sans lui. »
Quant à Butler, elle aussi est impatiente de se rendre à Ottawa. « Je pense que ma participation à la cérémonie du jour du Souvenir à Ottawa sera une expérience mémorable, dit-elle. J’ai l’impression qu’elle me permettra d’assumer pleinement ma commémoration personnelle, et j’espère que je pourrai en rapporter quelque chose qui m’aidera à renforcer le sentiment du souvenir d’autres gens ».
Pour les intéressés, les poèmes, compositions et affiches des premières places seront exposés au Musée canadien de la guerre, à Ottawa, jusqu’au mois de mai 2015.
Résultats nationaux de 2014
Séniors
Affiches en couleurs — première place : Joo Hee Chung de Langley (C.-B.); deuxième : Srinidhi Shaw de Hamilton (Ont.); mention honorable : Nanako Emori de Banff (Alb.)
Affiches en noir et blanc — première place : Darynn Bednarczyk de Cranbrook (C.-B.); deuxième : Naomi Wang de Cornwall (Ont.); mention honorable : Keisha Collins d’Eastport (T.-N.)
Poésie —première place : Sarah Jessica Butler de Torbay (T.-N.); deuxième : Alice Grier Guimond de Woodmore (Man.); mention honorable : Kailey Marie Kralkay de Quill Lake (Sask.)
Composition — première place : Hareem Masroor de Nanaimo (C.-B.); deuxième : Cassandra Slade de Carbonear (T.-N.); mention honorable : Bessie McNary de Hazlet (Sask.)
Intermédiaires
Affiches en couleurs — première place : Mary Mao de Coquitlam (C.-B.); deuxième : Sarah Cheyenne Feener de Grand Falls (T.-N.); mention honorable : Charissa Alana Teal de Hagersville (Ont.)
Affiches en noir et blanc — première place : Christine Devine, Toronto; deuxième : Marina Gampe d’Unity (Sask.); mention honorable : Brianna Cruse de St. Albert (Alb.)
Poésie — première place : Jordan Pomeroy de Placentia (T.-N.); deuxième : Jordan Marie Florence Jacobs de Rockglen (Sask.); mention honorable : Houda Shafique de Longueuil (Qc)
Composition — première place : Rachel Cey de Wilke (Sask.); deuxième : Kate Reilly de Richmond (C.-B.); mention honorable : Veronica MacDonald de Goshen (N.-É.)
Juniors
Affiches en couleurs — première place : Anneke Joy Brink de Brampton (Ont.); deuxième : Shuke (Amelia) Jiang de Calgary; mention honorable : Alexis Gortemarker de Lorette (Man.)
Affiches en noir et blanc — première place : Trista Bering de Kingsville (Ont.); deuxième : Carnell Zhou de Vancouver; mention honorable : Kacey Douthwright de Southfield (N.-B.)
Poésie — première place : Roman Javorek de Kentville (N.-É.); deuxième : Joshua Rohde de Lumsden (Sask.); mention honorable : Jaden Gammon de Tetagouche-Nord (N.-B.)
Composition — première place : Laren Gatto d’Elmsdale (N.-É.); deuxième : Vincent Belzile de Fredericton; mention honorable : Cassandra Anne Hogan de Small Point (T.-N.)
Primaires
Affiches en couleurs — première place : Randi Milbrandt d’Estevan (Sask.); deuxième : Victoria Donna Jackson de Cole Harbour (N.-É.); mention honorable : Titus Stahl de Camrose (Alb.)
Affiches en noir et blanc — première place : Jessica Hofer de Camrose (Alb.); deuxième : James Theodore Brink de Brampton (Ont.); mention honorable : Madalyn Waye-Sobey, de Maple Glen (N.-B.)
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