98 Canadiens ont-ils reçu la Croix de Victoria?

Joel Kimmel

Tom MacGregor dit que OUI

Il est difficile de savoir exactement à combien de « Canadiens » la Croix de Victoria, plus haute distinction du Commonwealth pour bravoure en présence de l’ennemi, a été décernée. Nous, rédacteurs de la revue Légion, avons l’habitude de dire simplement « près de 100 ». 

D’une part, la Loi sur la citoyenneté canadienne n’est entrée en vigueur que le 1er janvier 1947, près de deux ans après le dernier haut fait pour lequel un Canadien a obtenu une VC. Ainsi, selon cette condition, la majorité de « nos » récipiendaires de la VC n’étaient pas du tout canadiens. Terre-Neuve ne faisait pas partie du Canada avant 1949, mais nous nous sentons toujours fiers des VC obtenues par John Bernard Croak et Ricketts Thomas.

Un bon nombre parmi les gens qui en ont été décorés étaient des immigrants, venus principalement de Grande-Bretagne. Certains d’entre eux sont retournés en Grande-Bretagne servir dans les unités avec lesquelles ils avaient été associés avant de venir au Canada. D’autres étaient des Américains venus s’enrôler dans l’armée canadienne parce que leur pays était encore neutre. Nous savons que d’autres sont venus d’Ukraine ou du Danemark.

Quoi qu’il en soit, je soutiens que leur nombre est de 98 : 15 avant la Première Guerre mondiale, 70 à la Première Guerre mondiale, et 13 à la Seconde Guerre mondiale.

 

Les rédacteurs de la Légion sont arrivés à ce chiffre en consultation avec l’historien Arthur Bishop, fils du titulaire de la VC Billy Bishop, pour une série en 18 parties que nous avons publiée entre 2004 et 2006.

Pour en faire partie, la personne devait remplir au moins une des conditions suivantes :

avoir servi dans l’armée canadienne au moment de l’acte de vaillance ;

être né au Canada, dans un de ses territoires ou à Terre-Neuve ;

avoir établi sa résidence permanente au Canada, dans un de ses territoires ou à Terre-Neuve avant le service pendant lequel l’action a eu lieu ;

être résident du Canada, d’un de ses territoires ou de Terre-Neuve avant le déclenchement de la guerre au cours de laquelle la prouesse a eu lieu.

Ces critères à l’esprit, Bishop a écrit la série dans la conviction qu’il y avait 96 titulaires canadiens. En réponse au courrier du lectorat, cependant, les rédacteurs ont reconnu qu’il y en avait deux qui avaient été injustement omis et ont ajouté un article à la série.

Nul doute que certains des 98 hommes considéraient qu’ils étaient Britanniques, Irlandais, Américains, Ukrainiens ou Danois.

Raymond de Montmorency, né à Montréal, servit dans l’armée britannique au Soudan. Lors de la bataille d’Omdurman, le 2 septembre 1898, il faisait partie de la force de cavalerie qui prit part à une victoire décisive de l’armée britannique en infériorité numérique face à 52 000 guerriers mahdistes. Bien entendu, les Britanniques étaient armés de mitrailleuses et d’artillerie, tandis que l’ennemi n’avait que des fusils et des lances, prélude de ce que serait la guerre au XXe siècle.

Le Dr John Sinton, né à Victoria, se trouvait dans les ruines d’Orah, en Mésopotamie (Irak d’aujour-d’hui), où il fit preuve d’un grand courage en s’occupant des blessés sous le feu nourri de l’ennemi. Même quand il fut blessé lui-même, il continua de s’occuper des hommes pendant les combats.

Nul doute que certains de ces 98 hommes considéraient qu’ils étaient britanniques, irlandais, américains, ukrainiens ou danois. Nous considérons qu’ils étaient canadiens et nous en sommes fiers. 

Joel Kimmel

Brian Pascas dit que NON

Sur les 1 358 Croix de Victoria (VC) décernées à ce jour dans le Commonwealth britannique, 628 ont été attribuées entre 1914 et 1918, pendant la Première Guerre mondiale. Selon les critères utilisés, certaines sources publiées affirment qu’il y eut plus de 70 titulaires canadiens de la VC au cours de la seule Grande Guerre, tandis que d’autres affirment qu’il y en eut 64. Selon ce dernier décompte, il y a moins de 98 bénéficiaires canadiens de la VC au total.

Ils servirent dans des unités militaires britanniques, mais on les considère comme titulaires canadiens de la vc.

Certains utilisent des critères pour les titulaires canadiens de la VC qui comprennent le fait d’être membre d’un service militaire canadien, d’être né au Canada ou d’être résident du Canada. Les deuxième et troisième critères impliquent que quelqu’un n’avait pas nécessairement porté d’uniforme canadien au moment de l’acte lié à la VC.

Cela signifie qu’un soldat servant dans un bataillon britannique ferait partie des titulaires de la VC canadiens s’il avait résidé au Canada avant la guerre.

Par exemple, Michael O’Leary, qui immigra au Canada en 1913 et travailla en Saskatchewan pendant 13 mois, puis retourna au Royaume-Uni pour s’enrôler dans le 1er Bataillon de l’Irish Guards en serait un. O’Leary obtint la VC pour son acte de bravoure le 1er février 1915 au front de l’Ouest. Les affiches de recrutement l’honoraient en tant que héros irlandais. Son acte de bravoure se produisit deux semaines avant que la 1re Division canadienne ne descende dans les tranchées pour la première fois, à Armentières. O’Leary, Edmund de Wind, Thomas Wilkinson et Rowland Bourke servirent dans des unités militaires britanniques, mais on les considère tous les quatre titulaires canadiens de la VC si la résidence au Canada seule est un critère acceptable.

L’inclusion dans la liste des détenteurs canadiens de la VC pour raison de naissance au Canada ne tient pas compte de ceux qui ont émigré au Royaume-Uni, y ont établi leur résidence permanente et ont servi dans une unité militaire britannique. Philip Bent, John Sinton et Robert Cruickshank naquirent au Canada, mais il émigrèrent au Royaume-Uni et servirent dans des unités de l’armée britannique ou indienne.

Si l’on considère ces trois hommes titulaires canadiens de la VC, 29 membres du Corps expéditionnaire canadien qui ont reçu la VC — comme Hugh Cairns, George Pearkes et James Richardson — devraient être identifiés comme détenteurs britanniques de la VC vu qu’ils naquirent au Royaume-Uni.

 

Toutefois, si l’un des critères pour dire qu’un récipiendaire de la VC est Canadien est d’avoir servi dans l’armée canadienne, sans tenir compte de sa citoyenneté, de sa résidence, ni de son détachement à une unité militaire non canadienne (le Royal Flying Corps ou la Royal Air Force, par exemple), alors le nombre de récipiendaires canadiens de la VC à la Première Guerre mondiale est réduit à 64. Cela signifie que les membres du CEC (quel que soit le pays de leur naissance ou de leur domicile) et ceux qui, nés au Canada, ont servi dans l’aviation britannique sont des récipiendaires canadiens de la VC.

En 1919, le lieutenant-général Arthur Currie conserva un registre matricule des Canadiens à qui la VC avait été décernée. Il contenait 62 membres du CEC, dont Billy Bishop (détaché au RFC), William Barker (qui servit dans la RAF) et Alan McLeod (qui servit dans le RFC). Ces critères simples pour la Première Guerre mondiale (essentiellement un insigne de casquette, un insigne de col ou un galon d’épaule canadiens) demeurent valides un siècle plus tard. 


TOM MacGREGOR travaille à la revue Légion depuis 1989, en tant que rédacteur attitré, rédacteur adjoint et, actuellement, rédacteur-réviseur de nouvelles. Avant de se joindre à la revue, il a travaillé pour The Huntsville Forester, The Edmonton Sun et Maclean’s. Il est également l’auteur de pièces de théâtre, de quatre recueils de poésie et de «  Canada and the Victoria Cross  » dans la série Canada’s Ultimate Story.

BRIAN PASCAS est chercheur indépendant et auteur de la série en trois parties Canada’s Great War Victoria Cross Recipients qui a été publiée à www.canadianmilitaryhistory.ca. Il est membre de longue date de la Western Front Association.

 

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