L’ennemi aux portes

L’U-517 plonge lorsque le lieutenant d’aviation Maurice J. Bélanger l’attaque,
le 29 septembre 1942 Bélanger (à d.) et son équipage attaquèrent le sous-marin trois fois ce mois-là..
DND/PMR 77-178

En septembre 1942,le lieutenant d’aviation Maurice J. Bélanger attaqua l’U-517 allemandau large de la côte estdu Canada.

La guerre avait gagné les côtes du Canada. Entre mai et octobre 1942, les U-boot allemands s’étaient livrés à une brutale offensive contre le Canada dans le golfe du Saint-Laurent et dans le fleuve Saint-Laurent. Ils avaient coulé 21 navires et causé la mort de 300 personnes. Un U-boot en particulier était responsable d’une grande partie du carnage.

Le 26 aout 1942, l’U-517 que commandait Paul Hartwig, Kapitänleutnant (lieutenant de vaisseau) âgé de 27 ans, se faufila dans le détroit de Belle-Isle jusqu’au golfe du Saint-Laurent. Il s’agissait de la première opération qu’Hartwig commandait, et le sous-marinier se révéla aussi agressif que doué. L’U-517 envoya neuf bâtiments par le fond en moins d’un mois, dont la corvette NCSM Charlottetown. Il fallait faire quelque chose.

Le Commandement aérien de l’Est de l’Aviation royale canadienne affecta 35 aéronefs supplémentaires aux opérations dans la région, et établit un « détachement de chasseurs de sous-marins » spécial avec six bombardiers de patrouille Lockheed Hudson du 113e Escadron (bombardement-reconnaissance) basé à Chatham, N.-B. Chaque avion avait quatre membres d’équipage.

Les pilotes et l’équipage du 113e comprirent vite à qui ils avaient affaire : en seulement 24 heures, les 24 et 25 septembre, ils repérèrent l’U-517 sept fois et lancèrent trois attaques. Deux de ces attaques furent menées par le lieutenant d’aviation Maurice J. Bélanger, 23 ans, ancien instructeur de vol né au Québec qui avait grandi à Vancouver.

Le 24 septembre, vers 22 h 30, Bélanger attaqua l’U-517 au clair de lune près de l’ile d’Anticosti. Il était à 12 mètres au-dessus de lui. Deux grenades sous-marines tombèrent près de la poupe du submersible et le secouèrent fortement. Les Canadiens mitraillèrent aussi le sous-marin, mais sans effet. « Deux explosions puissantes vers la poupe. Trois bombes larguées; la troisième juste à côté du navire », écrivit Hartwig dans son journal de bord. Ils l’avaient presque eu. Réglées pour détoner à faible profondeur, les grenades sous-marines perdaient toute efficacité dès que le sous-marin plongeait, même à quelques secondes près.

Le lendemain matin, le 113e obligea l’U-boot à plonger à deux reprises. Dans l’après-midi, Bélanger décela à nouveau sa cible, qui suivait un convoi. Il passa à l’attaque, mais ses grenades sous-marines manquèrent de peu la cible, et Hartwig parvint à s’esquiver en plongeant. Les patrouilles aériennes réussirent tout de même à obliger l’U-517 à rester submergé : limité par sa vitesse sous l’eau, il ne pouvait plus suivre ses cibles potentielles. 

Les chasseurs comprirent vite à qui ils avaient affaire.

Hartwig décida de tenter sa chance vers Gaspé. Il ne put cependant pas échapper au 113e. L’après-midi du 29 septembre, à l’issue d’une longue patrouille, Bélanger et son équipage aperçurent l’U-517 à 37 kilomètres au large de Gaspé. Le pilote descendit en piqué de 1 500 mètres à 18 mètres et largua quatre grenades sous-marines sur le submersi-ble qui naviguait à la surface. 

Voici ce qu’il écrivit plus tard : « Les grenades ont explosé tout autour de la coque, légèrement à l’avant du kiosque. Une grosse déflagration a entouré la coque […]. La proue du sous-marin est sortie de l’eau et tout mouvement vers l’avant s’est arrêté. Le sous-marin a semblé ensuite se diriger droit vers le fond […] on n’a observé aucune trace de débris, de bulles d’air ou de carburant ». Hartwig admit que les grenades sous-marines de Bélanger avaient été « bien placées », mais son U-boot ne subit que des dégâts mineurs. 

La Croix du service distingué dans l’Aviation fut décernée à Bélanger en reconnaissance des trois attaques qu’il avait menées avec détermination contre l’U-517. Il reçut une barrette à cette décoration en 1944 alors qu’il servait outre-mer comme pilote de bombardier.

Hartwig quitta les eaux canadiennes au début du mois d’octobre. La Marine royale britannique coula l’U-517 le mois suivant au large de la France. Les personnes qui interrogèrent Hartwig après sa capture notèrent que c’était un « jeune nazi froid et calculateur […] dévoué à son führer ». Dans les années 1950, il finit par rejoindre la marine de la République fédérale d’Allemagne, où il acquit le grade de vice-amiral. 

 

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