Un pavillon rendu à la marine

Un béret de marin de la Kriegsmarine pris comme trophée.
Edward W. Dinsmore/MDN/

Conservé comme trophée, il avait flotté sur un U-boot qui s’était rendu

Les pavillons de vaisseaux servent à indiquer leur nationalité. Ils incarnent aussi l’honneur de l’équipage. « Clouer son pavillon » en le fixant au mât était une façon de montrer la détermination de l’équipage à ne jamais se rendre : c’est ce que fit le cuirassé allemand Bismarck en 1941 lorsqu’il sombra, son étendard de combat toujours hissé, après la royale volée que lui avait administrée la marine britannique.

Ce pavillon de la marine du Canada
BAC/MDN/PA-116720

Le contraire était de « mettre pavillon bas », c’est-à-dire de baisser le pavillon et de le remettre aux vainqueurs avec le navire, qui le remplaceraient par leur propre pavillon. C’est ce geste hautement symbolique que le Bismarck refusa aux Britanniques.
Il fut toutefois librement accordé au Canada à la fin de la guerre : le pavillon canadien fut hissé sur deux U-boots dans l’Atlantique Ouest qui se rendirent.

U-889 après sa reddition (à gauche) près de Shelburne, N.-É., le 13 mai 1945. Le drapeau fut gardé comme trophée.
Victoria Ioganovv/MRC
Le 4 mai 1945, l’amiral Karl Dönitz ordonna aux équipages des U-boots de rejoindre leur port d’attache ou de se rendre aux Alliés, tout en leur assurant que leur « honneur ne serait pas entaché ».
Il y avait alors 156 sous-marins allemands en mer.

Deux qui patrouillaient en Atlantique Ouest se rendirent à des navires canadiens et furent escortés dans des ports de Terre-Neuve et de Nouvelle-Écosse.

« Je pensais que ce serait une bonne idée de le rendre à la marine. »—Bob Haden, matelot de 2e classe

L’U-889 fut intercepté le 10 mai au large de la côte sud-est de Terre-Neuve et se rendit officiellement le 13 mai, à son arrivée à Shelburne, N.-É.
Il fut mis au service de la Marine royale canadienne le lendemain. Le sous-marin « était doté de la toute dernière technolo-gie », note Jean Stéphane Ouellet, capitaine de vaisseau, commandant de la Force des sous-marins canadiens d’Esquimalt, C.-B.
Le NCSM U-889 arbora le pavillon de la marine canadienne pendant que sa technologie, les torpilles acoustiques et le réseau d’hydrophones en particulier, était analysée et mise à l’essai au Centre de recherche navale à Halifax.
L’U-889 allait être remis à la marine étasunienne et bien que l’on dissuadât la collecte de trophées, « il n’est pas déraisonnable de présumer que les officiers et les marins voulaient un souvenir », explique le capitaine Ouellet.

Le matelot de 2e classe Bob Haden, mécanicien motoriste affecté à l’U-boot, avait des vues sur une horloge en laiton, déclara-t-il dans un article publié dans Lookout. Cependant, la pendule avait aussi été remarquée par un officier, qui lui offrit le pavillon en échange.
Et voilà comment un objet historique ca-nadien fut mis de côté pendant plus de trois quarts de siècle, jusqu’à ce que Bob Haden se décide à le redonner à la marine à l’âge de 97 ans. Il le remit à M. Ouellet à l’automne 2021 lors d’une cérémonie à la filiale Prince Edward de la Légion royale canadienne, à Victoria.
Le pavillon va être encadré et affiché au quartier général de la Force des sous-marins canadiens, à Esquimalt, à côté du pavillon canadien du NCSM U-190, sous-marin qui, en avril 1945, fit sombrer le NCSM Esquimalt, dernier bâtiment canadien perdu aux mains de l’ennemi.L’U-889 fut sabordé par les États-Unis en 1947, mais l’U-190 eut une fin plus symbolique : il fut pris pour cible et coulé par des vaisseaux de la Marine royale canadienne et des aéronefs de l’aéronavale le 24 juillet 1947 à l’endroit où avait sombré l’Esquimalt.

 

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