La ville du sommet

Les dirigeants du Canada, de la Grande Bretagne et des États-Unis se rencontrent lors de la première conférence de Québec en aout 1943. De g. à d. : William Lyon Mackenzie King, Franklin Delano Roosevelt, Winston Churchill et le comte d’Athlone, gouverneur général.
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La première Conférence de Québec, nom de code Quadrant, fut une conférence au sommet pendant la Seconde Guerre mondiale à laquelle assistèrent le président américain, Franklin Delano Roosevelt, le premier ministre britannique, Winston Churchill, ainsi que leurs chefs d’état-major, hauts diplomates et conseillers.

La conférence eut lieu du 17 au 24 aout 1943 à la Citadelle et à l’hôtel Château Frontenac qui avait été réquisitionné pour l’occasion. C’est Roosevelt qui avait suggéré le lieu de la conférence, pour le plus grand bonheur des habitants de la ville et de la presse canadienne. La police militaire, la GRC, des avions survolant les alentours et des batte-ries antiaériennes installées sur les plaines d’Abraham assuraient la protection du site.

Le sergent-major Émile Couture (à g.) trouva un porte-documents égaré contenant des plans concernant le Débarquement du Jour J.
The Legionary

Ces éminents politiciens et soldats s’accordèrent sur un large éventail de mesures : le calendrier du Débarque-ment en France (Jour J) en 1944, une coopération pour le développement d’une bombe atomique, la libération de l’Italie continentale (amorcée deux semaines plus tard), et des offensives en vue d’acquérir des bases d’où seraient lancées les campagnes de bombardement sur le Japon.

William Lyon Mackenzie King, premier ministre du Canada et hôte de la conférence, resta largement en retrait. Il ne participait pas aux délibérations à haut niveau concernant la stratégie globale des Alliés, principalement car Roosevelt, qui désirait éviter de créer un précédent où les petits pays alliés chercheraient à participer aux conférences à venir, l’avait refusé.

Malgré l’énorme contribution du Canada à la guerre, et même si Mackenzie King, Churchill et les états-majors canadien et britannique se réunissaient séparément, Mackenzie King et ses conseillers militaires n’assistèrent à aucune des réunions clés.

Il se contenta de remplir ses fonctions d’hôte, notamment en organisant un diner officiel à la Citadelle où il fournit « whisky et soda », comme le souligna avec un brin d’ironie l’historien CP Stacey. Il tira toutefois une certaine gloire de la compagnie de ces grands hommes d’État, et il était ravi d’être photographié à leurs côtés.

Un des évènements les plus extraordinaires – et étouffés – de la conférence fut une sérieuse faille de sécurité qui aurait pu avoir des répercussions désastreuses.

Émile Couture, sergent-major de l’Armée canadienne, trouva ainsi dans une salle de réunion du Château Frontenac un beau porte-documents en cuir étiqueté « Churchill-Roosevelt, Quebec Conference, 1943 », qu’il décida (inexplicablement) de garder comme souvenir de l’évènement. Ce qu’il n’apprit que plus tard ce soir-là, c’est que le porte-documents contenait les plans détaillés de l’opération Overlord : le Débarquement du Jour J en Normandie!

Il cacha le renseignement très secret sous son matelas et le remit à un officier haut gradé de l’Armée canadienne le lendemain matin. Le sergent-major Couture fut l’objet d’une enquête approfondie du FBI et de Scotland Yard, et l’année suivante, il reçut la Médaille de l’Empire britannique pour avoir protégé les informations secrètes.

Mackenzie King se disait fier que notre pays fût « la scène de cette rencontre mémorable », qui serait « considérée dans les années à venir comme l’un des grands évènements de notre histoire nationale ».

Après la conférence, Churchill, qui avait été fort acclamé à Québec par de grandes foules, s’en alla à la pêche, petite escapade qu’il avait très envie de s’offrir. Une autre conférence semblable eut lieu dans la ville en septembre 1944.

Le gouvernement du Québec inaugura une statue commémorant les deux conférences en 1998. Elle représente Roosevelt et Churchill, mais pas Mackenzie King, immortalisant ainsi par son absence le rôle secondaire que ce dernier avait eu dans ces évènements.

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