Joseph Kaeble, premier militaire canadien de langue française décoré de la Croix de Victoria, nait le 5 mai 1893 à Saint-Moïse, Québec. Sa famille déménage à Sayabec, au Québec, après le décès de son père quand Joseph, aîné de quatre enfants, est garçon, et il y trouve du travail comme mécanicien dans une scierie locale.
Après l’annonce de l’autorisa-tion de former le 189e Bataillon commandé par le lieutenant-colonel Philippe-Auguste Piuze, Kaeble et une dizaine d’hommes de Sayabec s’enrôlent le 20 mars 1916. Ils passent six mois au camp d’entrainement de Valcartier et partent pour le front le 23 septembre. Une fois sur place, Kaeble est affecté au 69e Bataillon puis, le 12 novembre, il est transféré au 22e Bataillon qui, après avoir combattu et subi de lourdes pertes à Saint-Éloi et au mont Sorrel, en Belgique, ainsi qu’à Courcelette et à la tranchée Regina, en France, a grand besoin de renforts.
Les renforts, dont Kaeble fait partie, sont rapidement jetés dans la bataille, notamment celle de la crête de Vimy, en France, en avril 1917. Kaeble y est atteint d’une balle à l’épaule droite le 30 avril. Le 25 mai, au bout de presque un mois de convalescence dans un hôpital de Boulogne, en France, il retourne au front. Il passe le reste de l’année 1917 en Belgique, notamment à la côte 70 et à Passendale. En 1918, le 22e Bataillon retourne en France, où Kaeble est promu caporal le 23 avril.
En juin, le bataillon se trouve dans le secteur de Neuville-Vitasse, près d’Arras. Pendant la nuit du 8 au 9 juin, les Allemands lancent une attaque contre le secteur défendu par le bataillon. Lorsque le tir de l’ennemi cesse, Kaeble est le seul soldat indemne de sa section. Voyant une cinquantaine d’Allemands s’avancer vers sa position, il saute par-dessus le parapet de sa tranchée, armé d’un fusil-mitrailleur Lewis et, bien que blessé à plusieurs reprises par des fragments d’obus et de bombes, il tire sur l’ennemi jusqu’à ce qu’il s’arrête. Blessé à mort, Kaeble retombe dans la tranchée, mais il continue de tirer sur l’ennemi en retraite en criant « Tenez bon, les gars! Ne les laissez pas passer! Il faut les arrêter! » Il meurt le lendemain de blessures par balle au cou, à la main et aux bras, ainsi que de blessures aux jambes. La mère de Kaeble recevra par la suite la Croix de Victoria des mains du gouverneur général, le duc de Devonshire. Selon les archives, Kaeble a fait l’objet d’une recommandation pour que lui soit décernée la Médaille militaire pour ses actes au cours de cette période. Il repose au cimetière communal de Wanquetin, à 12 kilomètres à l’ouest d’Arras.
La Croix de Victoria a été décernée à deux Canadiens français seulement pendant la Première Guerre mondiale. La seconde a été remise à titre posthume au lieutenant Jean Brillant pour ses actes de bravoure les 8 et 9 aout 1918.
Kaeble est commémoré partout au Canada. Une montagne, une rue et le mess des soldats et des caporaux à la base des Forces canadiennes Valcartier portent son nom, qui figure aussi sur le monument commémoratif de l’église paroissiale de Sayabec. En 2012, la garde côtière canadienne a annoncé qu’un navire de patrouille de la classe Héros serait nommé en son honneur, et son buste fait partie du Monument aux valeureux à Ottawa, un agencement de neuf bustes et de cinq statues de personnes qui ont vécu pendant des conflits déterminants dans l’histoire du Canada.
Les médailles de Kaeble sont exposées au Musée du Royal 22e Régiment, situé dans la Citadelle de Québec, et de la terre de sa sépulture a été incorporée aux murs de la chapelle.
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