La guerre sur deux roues

Le modèle WLC (les lettres WL concernaient le type de moteur et le C, le modèle canadien) de Harley-Davidson était une des motocyclettes des estafettes et de la police militaire canadiennes durant la Seconde Guerre mondiale et la guerre de Corée.
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Les motocyclettes furent indispensables durant les deux guerres mondiales

Les Canadiens n’avaient qu’une poignée de motocyclettes quand ils partirent pour l’Europe, mais avant la fin de la guerre, ils en avaient utilisé des milliers.

Les poseurs de lignes s’en servaient pour vérifier les fils télégraphiques, les officiers, pour le transport et les fantassins, pour la reconnaissance. Elles servaient aussi à livrer des fournitures médicales et à évacuer les blessés.

Quelques-unes avaient un side-car armé d’une mitrailleuse. Cependant, leur rôle le plus important était le transport des messages entre le quartier général et les unités éloignées en Angleterre, et les bataillons et les batteries au front. Les estafettes livraient même des pigeons voyageurs dans des paniers d’osier qu’ils portaient sur le dos.

L’écusson de l’estafette se portait au bas de la manche durant la Seconde Guerre mondiale.
filiale de la LRC 641 de Barrhaven

Les motocyclettes allaient partout où allaient les soldats canadiens, jusqu’à Vladivostok, sur la côte pacifique de la Russie. Au front occidental, les estafettes apprirent à régler leur vitesse en fonction de la fréquence des explosions d’obus.

Les Canadiens préféraient les Hendee Indian fabriquées au Canada, mais ils utilisaient aussi des Triumph, des Clyno-Vickers et des Douglas britanniques. Elles tombaient souvent en panne, et il fallait beaucoup de savoir-faire pour les réparer. « Une motocyclette ne durait pas deux mois », déclara le caporal Bert Bennes au Winged Wheel Patch.

Bennes se souvient d’avoir participé au vol et au démontage de deux motocyclettes d’officiers qui les avaient imprudemment laissées sans surveillance devant un bar. Une roue arrière fut prise par une estafette, les guidons, une roue avant et une boîte de vitesses furent distribués à d’autres. « On biffait les numéros à la lime, on jetait nos pièces brisées dans le canal et on avait de nouvelles pièces. C’est comme ça qu’on entretenait nos motocyclettes. »

À Falaise, France, en 1944, le caporal suppléant Bill Baggott (en haut) fait un somme sur une motocyclette dont le réservoir porte des traces d’usure parce que les Canadiens s’asseyaient dessus.
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Selon Clive M. Law, auteur de The Canadian Military Motorcycle, pendant les 100 derniers jours de la guerre, les motocyclettes servaient à la reconnaissance pour les troupes d’assaut et à identifier les points d’appui que les canons, la cavalerie et les fantassins de la brigade devaient démolir.

« Le premier soldat allié sur le territoire allemand après la déclaration de la trêve chevauchait une motocyclette », écrivaient Max Burns et Ken Messenger dans The Winged Wheel Patch.

La vitesse, l’adaptabilité et la puissance brute de la motocyclette étaient inestimables; les Alliés en produisirent plus de 700 000.

« Après l’adresse au tir, la capacité de conduire une motocyclette était proba-blement la qualification militaire qu’on obtenait le plus souvent », écrivit Law, et on donnait des cours de sécurité, de lecture de cartes et d’entretien. D’aucuns disaient que la seule raison pour laquelle les cours de conduite de motocyclette étaient moins dangereux que le combat, c’était l’absence de coups de feu.

Des motocyclettes furent affectées à chaque régiment, et elles furent utilisées par les corps des transmissions, du renseignement et de la reconnaissance, par la police militaire et par les troupes d’invasion. Elles servirent à poursuivre les avions ennemis qui s’écrasaient pour en capturer l’équipage. Une douzaine furent modifiées et équipées d’un tuba pour le raid de Dieppe, mais aucune estafette ne franchit la plage.

Un motard d’une unité de mitrailleurs de la Première Guerre mondiale embourbé (ci-dessus) reçoit un coup de main de soldats du Canadian Scottish Regiment.
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Là où les camions étaient bloqués par la circulation ou le mauvais temps, les vaillantes motocyclettes faisaient leur devoir. Les estafettes servaient de guides à la brèche de Falaise, fusaient autour des plages de Normandie au lendemain du Débarquement et franchissaient les régions boueuses et les rivières en Italie.

La posture des estafettes canadiennes, assises, le dos droit, sur le réservoir d’essence (et risquant ainsi des mesures disciplinaires), leur valut le surnom de Crazy Canucks (les Canadiens cinglés, NDT).

Les estafettes avaient un rôle des plus dangereux : livrer des renseignements que l’ennemi désirait ardemment saisir ou détruire. Elles empruntaient des chemins non balisés, parfois sous les coups de feu, souvent sans phare durant la nuit, ce qui augmentait le risque d’accident. Elles escortaient les convois, zigzaguant entre les véhicules.

Les pertes, tant humaines que matérielles, étaient élevées. « J’ai démoli neuf motocyclettes […] en Italie, » dit Darrell White lors d’une entrevue qu’il accorda au Projet Mémoire. Le propagandiste nazi Lord Haw Haw disait qu’il n’y avait pas lieu de s’inquiéter des Canadiens. « Donnez-leur simplement une bouteille de whisky et une motocyclette, et ils se tueront eux-mêmes. »

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